Intervention de Raymond Cointe

Réunion du jeudi 1er février 2018 à 10h45
Mission d'information sur la gestion des évènements climatiques majeurs dans les zones littorales de l'hexagone et des outre-mer

Raymond Cointe, directeur général de l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS) :

La réglementation en matière de risques technologiques est assez différente de celle du domaine nucléaire compte tenu du nombre beaucoup plus important d'installations potentiellement concernées. En la matière, c'est le code de l'environnement qui s'applique et la réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE). Les ICPE doivent respecter certaines prescriptions générales définies par l'État. En l'occurrence, nous venons en appui de la DGPR pour définir ces prescriptions qui sont soumises à des contrôles ou inspections de la part des inspecteurs des installations classées.

En ce qui concerne les activités les plus dangereuses, les exploitants sont tenus de démontrer, dans une étude de dangers, qu'ils ont identifié les risques susceptibles de survenir, élaboré des mesures de réduction adéquates et organisé un dispositif d'intervention approprié. Bref, le code d'environnement prévoit bien que les ICPE doivent prendre en compte les aléas naturels dans l'évaluation des risques.

En matière d'aléas liés au changement climatique, nous avons surtout travaillé, en association avec un certain nombre de partenaires étrangers dans le cadre de l'OCDE, sur tout ce qui concerne les inondations. À la différence de l'IRSN, notre rôle est plutôt de faire de la méthodologie au niveau national. En 2014, nous avons élaboré un guide méthodologique présentant la démarche à adopter face au risque d'inondation dans les installations classées. Ce guide présente l'analyse des risques adaptés à ces installations et propose des outils pratiques pour aider au diagnostic et capables de résister aux sollicitations mécaniques qui résulteraient d'une inondation. Depuis 2014, nous avons réfléchi sur les procédures à suivre pour sécuriser les sites industriels en cas d'inondation. Les inondations ayant un temps de montée en puissance assez long, cela permet de prendre des mesures organisationnelles, ce qui ne serait pas possible avec des aléas comme les séismes, pour lesquels il est trop tard pour faire quelque chose lorsqu'on a connaissance du risque.

Ces réflexions ont été conduites par notre ministère de tutelle, le ministère de la transition écologique, dans le cadre d'un groupe de travail sur les mesures à prendre en matière d'inondation. À la demande de la Direction générale de la prévention des risques, les inspecteurs des installations classées procéderont cette année à l'analyse des bonnes pratiques sur les sites concernés, afin de voir quelles bonnes pratiques ont été instaurées par les industriels. Nous allons accompagner la DGPR dans cette phase de recensement pour améliorer les bonnes pratiques qui peuvent être recommandées aux d'installations classées.

Les mesures principales prises aujourd'hui en matière de prévention du risque inondation concernent le plus souvent la réduction du risque. Sachant que les coûts de mise en conformité ou de mise en sécurité pourraient se révéler très élevés pour un certain nombre d'installations existantes, nous devons réfléchir à l'élaboration de mesures organisationnelles en cas de risque d'inondation afin de sécuriser les sites, ou en tout cas assurer leur résilience même si les niveaux d'aléas pris en compte pour le dimensionnement de l'installation sont dépassés. Tout à l'heure, j'ai parlé de la tempête Harvey à Houston et de l'usine d'Arkema. Il s'agit d'un événement où le niveau d'aléa a été très supérieur à tout ce qui avait été prévu. Mais la population avait pu être évacuée avant l'explosion de certaines installations de l'usine qui ne présentait pas de risques environnementaux très importants étant donné que les produits utilisés ne laissent pas de traces dans l'environnement. On peut s'interroger sur la meilleure conduite à tenir dans ce type de situation, en tout cas réfléchir en amont au scénario à élaborer, incluant bien évidemment l'évacuation des populations. En l'occurrence, nous essayons de travailler sur le retour d'expérience de cet incident, mais c'est difficile étant donné qu'il a eu lieu à l'étranger. Il n'est pas exclu que la meilleure solution soit celle qui a été retenue, autrement dit laisser l'usine exploser. L'autre question que l'on aurait pu se poser dès lors que l'on savait qu'une inondation allait se produire est celle des mesures organisationnelles qui auraient consisté à déplacer les produits, à les entreposer dans des camions frigorifiques et à les emporter en dehors du site. C'était peut-être, dans ce cas particulier, une meilleure solution que d'avoir à mettre en place des mesures de protection difficiles à évaluer compte tenu de l'imprécision de l'aléa. La grande différence avec le risque nucléaire, c'est qu'en matière de risque industriel on peut, si les conséquences ne sont pas dramatiques, réfléchir également à des mesures organisationnelles et de résilience qui permettent de surmonter rapidement, après coup, la crise.

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