Intervention de Olivier Marleix

Réunion du mercredi 7 février 2018 à 16h15
Commission d'enquête chargée d'examiner les décisions de l'État en matière de politique industrielle, au regard des fusions d'entreprises intervenues récemment, notamment dans les cas d'alstom, d'alcatel et de stx, ainsi que les moyens susceptibles de protéger nos fleurons industriels nationaux dans un contexte commercial mondialisé

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Marleix, président :

Mes chers collègues, nous accueillons aujourd'hui M. Nicolas Dufourcq, directeur général de Bpifrance.

Vous avez eu, monsieur Dufourcq, une carrière très riche en responsabilités. Après avoir fait partie du cabinet de René Teulade, ministre des affaires sociales, vous avez rédigé aux côtés d'Alain Minc le rapport sur « La France de l'an 2000 ». Vous avez ensuite rejoint France Télécom en 1994 et y avez fondé la division « Multimédia » au sein de laquelle Wanadoo a été créé. Puis chez Capgemini, vous avez été directeur général adjoint et directeur financier.

Vous êtes à la tête de Bpifrance depuis sa création et vous venez d'être confirmé dans vos fonctions de directeur général par le Gouvernement il y a quelques jours.

La banque publique d'investissement est un organisme de financement et de développement des entreprises créé à la fin de l'année 2012. Elle est issue du rapprochement d'OSEO, de CDC Entreprises, du Fonds stratégique d'investissement (FSI) et de FSI Régions.

Votre audition portera sur trois thèmes principaux.

Premier thème : l'État actionnaire. Notre commission d'enquête cherche à savoir à quelles conditions et dans quelles circonstances l'actionnariat public peut encore être un moyen de contrer la perte de compétitivité et la désindustrialisation de notre économie. L'État actionnaire intervient aujourd'hui directement avec l'Agence des participations de l'État (APE) et indirectement via Bpifrance, dont il est co-actionnaire avec la Caisse des dépôts et consignations (CDC).

Comment se coordonnent vos interventions respectives ? Sont-elles d'ailleurs toujours coordonnées ?

Bpifrance et l'APE, sous l'impulsion, je crois, de Régis Turrini ont chacune pris le soin de rédiger des doctrines d'intervention dont on peut constater qu'elles se recoupent sur certains points. Dans les faits, elles conduisent à des participations que je n'oserais pas qualifier de concurrentes, mais qui se juxtaposent – je pense à Orange dont l'APE détient 13 % du capital et Bpifrance 10 %.

Pouvez-vous me donner votre avis sur cette complémentarité entre l'APE et Bpifrance ? Comment doit-elle fonctionner notamment dans les secteurs qui, aux termes de votre doctrine, sont stratégiques pour l'économie nationale et qui nous intéressent plus particulièrement ?

Je m'interroge aussi sur le niveau des participations de l'État, qui est souvent inférieur à la minorité de blocage. Bpifrance est ainsi actionnaire à hauteur de 5,29 % de Technip, entreprise cédée en 2016 à l'Américain FMC. N'avez-vous pas le sentiment qu'il s'agit d'un simple alibi politique permettant à l'État d'afficher un engagement durable alors qu'il aura en réalité assez peu de moyens de peser, en tout cas pas uniquement grâce à sa présence capitalistique ?

Deuxième thème : la protection des entreprises que l'on peut qualifier de stratégiques. Nous cherchons à mieux comprendre le rôle des grandes administrations de l'État et aussi d'autres institutions, notamment dans le cadre de la procédure des autorisations des investissements étrangers en France.

Bpifrance est-elle amenée à travailler avec la Direction générale des entreprises (DGE) et avec le Trésor ? Si oui, cette collaboration a-t-elle évolué, notamment depuis le décret Montebourg ? Nous sentons une vigilance accrue au sein de la DGE et de la direction générale du Trésor.

J'ai relevé que Bpifrance avait signé le 2 mai dernier avec la Direction générale de l'armement (DGA) un accord visant à créer un véhicule d'investissement « Défense », doté initialement de 50 millions d'euros. Ce fonds est-il d'ores et déjà intervenu auprès d'entreprises jugées stratégiques ? Selon vous, quel niveau pourrait atteindre sa dotation ? Pourrait-on imaginer la création d'autres fonds dans d'autres secteurs que la défense ayant une valeur stratégique pour notre économie ? Il existe déjà Aerofund dans le domaine aéronautique ou Demeter dans le secteur des éco-industries.

La DGE a dressé une liste, évolutive, des entreprises qu'elle considère comme stratégiques de manière à effectuer une veille efficace. Vous est-il arrivé de vous appuyer sur ce document ?

L'un des défis de cette veille est de ne pas oublier les petites entreprises et les start-up afin de pouvoir identifier les pépites de demain, qui sont susceptibles d'être rachetées par des groupes étrangers – perspective sur laquelle elles misent souvent. Comment pouvez-vous contribuer à la défense de ce que la loi considère comme relevant d'intérêts nationaux ?

Vous coordonnez le label French Fab. Nous serions heureux de connaître le nombre d'entreprises à l'avoir demandé. Y a-t-il parmi elles des entreprises étrangères ayant des sites de production en France ?

Troisième et dernier thème : comment résoudre le problème de la sous-capitalisation des entreprises françaises et donc de leur exposition à des prises de participation hostiles ? Comment mobiliser les investisseurs de long terme dont les exigences en termes de rendement pourraient être compatibles avec un horizon de temps plus long ?

Le Gouvernement a annoncé un projet de loi issu du plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE). Avez-vous formulé des propositions dans ce cadre ? Quel est votre avis sur la proposition n° 7 issues des réflexions d'un groupe de travail coanimé par un député et un chef d'entreprise, sous l'égide du Gouvernent : « Recentrer Bpifrance sur sa mission d'intérêt collectif et de résorption des failles de marché. Créer un fonds souverain avec pour mission de maximiser le rendement de ses investissements ». Est-ce vraiment compatible avec le besoin d'avoir des investisseurs de long terme moins gourmands que les investisseurs de marché ?

Conformément aux dispositions de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958, je dois maintenant vous demander de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

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