Intervention de Elsa Faucillon

Séance en hémicycle du jeudi 15 février 2018 à 15h00
Reconnaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la santé — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaElsa Faucillon :

Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, madame la rapporteure, mes chers collègues, l'ordonnance relative à la profession de physicien médical fait consensus parmi nous ; nous avons pour notre part réitéré notre accord à chaque fois que nous avons examiné la question en séance. Les choses se corsent s'agissant de l'ordonnance relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la santé. Dans le contexte actuel, je veux réitérer notre soutien aux personnels de santé, exsangues mais combatifs, et ce malgré les coupes budgétaires répétées. Vu les souffrances actuelles des professionnels, le zèle mis dans la transposition de la directive européenne relative à l'accès partiel aux professions de santé semble non seulement préjudiciable pour eux, mais aussi dangereux.

Rappelons que ce dispositif a suscité l'opposition de la quasi-unanimité des syndicats et des ordres de santé lors de l'avis rendu par le Haut conseil de professions paramédicales en octobre 2016, et qu'il ouvre la voie à une segmentation des professions de santé – certains professionnels ont même parlé d'une « ubérisation ». La transposition de cette disposition fait craindre la mise en place d'une médecine à deux vitesses, qui aurait des conséquences majeures sur l'organisation et la cohérence de notre système de santé.

Dans la mesure où la formation initiale et les compétences des métiers de santé sont différentes d'un pays à l'autre, l'ordonnance pourrait avoir des conséquences importantes non seulement sur la clarté, mais aussi sur la qualité des soins dispensés aux patients : voilà ce qui nous inquiète tout particulièrement, compte tenu de la rigueur demandée aux professionnels de santé français. Après la tarification à l'acte, est-ce au séquençage des actes que nous voulons passer ? On sait que l'un des atouts de nos infirmiers et de nos infirmières, c'est d'avoir la capacité de prendre en charge globalement un patient ; or un accès partiel aux professions de santé viendrait le remettre en cause.

De plus, ces professionnels seraient opportunément recrutés par des établissements de santé en pénurie de personnels ou par des collectivités frappées par la désertification médicale. Ce serait évidemment de nature à renforcer les inégalités territoriales de santé ; cela démantèlerait par bloc les métiers et compétences pour instaurer des sous-professions et ainsi « favoriser » – le terme est mal choisi – l'émergence d'une offre de soins low cost, sous-qualifiée et non garantie.

Surtout, une autre solution existait. On nous présente là une transposition particulièrement zélée de la directive européenne. Or le texte européen précise bien qu'un État membre devrait être en mesure de refuser l'accès partiel « en cas de raisons impérieuses d'intérêt général ». Nous sommes là face à des enjeux de santé publique : nous pourrions justifier de raisons impérieuses d'intérêt général. J'ai bien compris que nous étions appelés à prendre une ordonnance, mais celle-ci aurait pu avoir un contenu différent. Et si l'Union européenne a demandé à des États membres de revoir leur transposition de la directive, nous ne nous sommes même pas laissé cette possibilité. D'autres pays ont opté pour des transpositions bien moins zélées, sans pour autant se faire rappeler à l'ordre par la Commission européenne. Nous aurions donc pu emprunter un autre chemin, mais ce n'est pas la solution que le Gouvernement a retenue. Nous le regrettons. Par conséquent, nous estimons qu'il serait plus judicieux de ne pas transposer pour le moment cette mesure dans notre corpus législatif.

En l'état, nous voterons contre ces dispositions, …

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