Intervention de Jacqueline Gourault

Séance en hémicycle du jeudi 15 février 2018 à 21h30
Bonne application du régime d'asile européen — Article 1er

Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'état, ministre de l'intérieur :

Vous vous inquiétez de l'élargissement que laisserait présager cette modification introduite par la majorité sénatoriale et de son manque de prévisibilité et de clarté pour protéger les personnes contre l'arbitraire. Je tiens à vous rassurer sur la portée de ces modifications, qui sont précisément encadrées et définies par le règlement Dublin lui-même, lequel est d'applicabilité directe comme vous le savez : les éléments auxquels vous faites référence sont donc ceux qui figurent dans ce règlement. En effet, ses articles 4 sur le droit à l'information et 5 sur le déroulement de l'entretien individuel précisent que le demandeur est précisément informé des critères de détermination de l'État responsable pour sa demande d'asile et que l'entretien individuel organisé avec le demandeur « permet de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies ».

En l'espèce, chacun des trois points que vous évoquez est restrictif : le parcours migratoire, la situation familiale et les demandes d'asile antérieures caractérisent, au sens du règlement Dublin, des critères de détermination de l'État responsable. Ainsi, le demandeur relève de la compétence d'un État membre s'il a dans cet État des membres de sa famille bénéficiaires ou demandeurs d'une protection internationale, comme le disposent les articles 9 et 10 du règlement – c'est à cette logique de réunification familiale, qui bénéficie aux personnes, que renvoie le terme de « situation familiale » dans l'article qui vous préoccupe ; s'il a déjà introduit une demande d'asile ou bénéficie d'un droit au séjour, ce à quoi renvoient les mots « les demandes antérieures d'asile » – c'est l'article 12 ; à défaut, si son parcours migratoire l'a conduit dans des pays dans lesquels ses empreintes ont été prises, ce que caractérise le terme de « parcours migratoire ».

En clair, les éléments en cause sont précis, et d'ailleurs listés dans un formulaire type prévu par l'article 5 du règlement Dublin. Contrairement à ce que vous craignez, il ne s'agit donc pas de considérations générales et non bornées, dans lesquelles l'administration va piéger le demandeur en l'interrogeant sur des détails sans lien avec la mise en oeuvre du règlement.

En outre, je tiens à rappeler que votre texte a rajouté une garantie essentielle, que le Sénat n'a pas remise en cause, qui est qu'en tout état de cause, le demandeur d'asile qui vient de bonne foi déposer une première demande en France ne sera jamais soupçonné de présenter un risque de fuite – jamais.

Dans ce contexte, les modifications introduites par le Sénat ne me paraissent pas avoir une portée qui justifierait de remettre en cause le besoin de voir ce texte adopté rapidement. À ce stade de l'examen du texte et au regard de l'urgence que je viens de vous rappeler, le Gouvernement vous demande donc de retirer ces amendements ; à défaut, il ne pourra qu'y être défavorable.

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