Intervention de Émilie Guerel

Réunion du mercredi 14 février 2018 à 11h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉmilie Guerel :

Alors comment atteindre cet objectif ?

Nul ne pouvant envisager sérieusement aujourd'hui le rétablissement de la conscription, nous avons étudié plusieurs scénarios, leurs intérêts et leurs limites.

Mais un seul a retenu nos faveurs : il s'agit de la construction du parcours citoyen.

Nous croyons profondément en un service national universel qui rassemble, qui est attendu et valorisé par tous les jeunes, par toute la société, que ce soit dans les parcours universitaires, personnels ou professionnels.

Ce parcours citoyen doit donner à nos jeunes les moyens de s'émanciper en tant que citoyens actifs, prêts à s'engager pour leur nation.

Pour cela, il faudra que notre dispositif respecte quelques critères essentiels.

– Premièrement, le nouveau service national devrait prendre la forme d'un parcours, afin de s'ancrer dans le temps et les esprits, plutôt que de compter sur un moment unique pour distiller un message qu'aujourd'hui nous sommes collectivement incapables de transmettre.

– Deuxièmement, il devrait conjuguer, d'un côté, une phase obligatoire et identique pour tous les jeunes, et de l'autre, une phase reposant sur le volontariat qui pourra prendre différentes formes.

– Troisièmement, il devrait commencer dès le début de l'adolescence, à l'âge où les jeunes sont encore sous l'autorité parentale et pour la plupart scolarisés.

– Quatrièmement, il devrait donner confiance aux jeunes sur leur capacité à être utiles à la société ainsi que sur la capacité du dispositif à leur être utile, à eux.

– Cinquièmement, il devrait valoriser les dispositifs existants qui fonctionnent et associer de multiples acteurs : l'éducation nationale, les armées, la gendarmerie et les pompiers, l'ensemble des administrations, le monde associatif et, plus généralement, les citoyens engagés au sein de la réserve civique.

Ce nouveau service national universel comprendrait trois étapes.

La première concernerait les jeunes de 11 à 16 ans et, plus spécifiquement, les « années collège ».

De l'avis de tous, un service national n'a de sens que s'il débute dès le plus jeune âge, au moment où les jeunes ont besoin de repères structurants, pour leur développement personnel et leur intégration sociale. Par ailleurs, pour réconcilier une partie de la jeunesse avec la République, il faut s'adresser à eux avant 18 voire 16 ans, quand les préjugés ne sont pas encore formés.

De plus, l'immense majorité des jeunes est scolarisée et nous sommes persuadées qu'il faut s'appuyer sur l'école pour déployer cette première phase.

En tant qu'enseignante, je tiens à indiquer tout particulièrement que, si nous préconisons d'intervenir dans le cadre scolaire, nous n'entendons pas faire reposer la charge de la mise en oeuvre du service national sur les seuls personnels de l'éducation nationale.

Il ne s'agit pas non plus d'ajouter une mission à l'école. La transmission de connaissances doit demeurer la première des missions des enseignants.

Alors, pourquoi une nouvelle fois l'école ?

Parce qu'elle est le seul espace où l'on peut s'adresser à tous les jeunes, quelles que soient leur origine, leur situation matérielle ou physique. En visant les élèves scolarisés, on touche également les jeunes étrangers comme les jeunes en situation de handicap, qui pourraient être écartés d'autres dispositifs pour des raisons juridiques liées à la nationalité ou à l'accessibilité. L'école est, avec l'hôpital public, le seul lieu réellement universel en France.

Intervenir dans le cadre scolaire serait donc à la fois logique et pratique.

S'agissant de la phase obligatoire et identique pour tous, nous proposons d'abord de renforcer l'éducation à la citoyenneté dans le cadre scolaire, en réformant l'enseignement de défense afin de mieux l'identifier, le valoriser et l'évaluer.

Cet enseignement ne devrait pas être simplement « un enseignement de plus à inscrire au programme », comme l'écrivait Jules Ferry à propos de l'instruction civique.

Il devrait s'agir d'un enseignement dédié, évalué régulièrement par des contrôles et qui pourrait être inscrit en propre au programme du brevet.

Dispensé dès la sixième, il pourrait voir son programme étalé dans le temps, afin de lisser l'effort pédagogique, et comporter, davantage qu'aujourd'hui, des ateliers pratiques, des visites de sites et la participation à des cérémonies.

Parallèlement, nous proposons la création d'une semaine annuelle de la défense et de la citoyenneté, obligatoire dans chaque établissement scolaire de la sixième à la troisième, qui se déroulerait au même moment sur l'ensemble du territoire.

Cette semaine serait organisée autour de cinq modules : la défense et sécurité – la résilience - les droits et devoirs - la mémoire et l'engagement - ainsi qu'un bilan individuel.

Nous sommes très attachées à cette étape, car elle nous semble fondamentale et nous sommes persuadées qu'elle peut emporter l'adhésion des jeunes.

Une certaine liberté serait laissée aux chefs d'établissement pour concevoir un programme adapté au contexte local, en fonction des actions réalisables et des acteurs mobilisables.

En effet, cette semaine serait aussi l'occasion d'ouvrir l'école à des intervenants extérieurs, tels que des soldats et des gendarmes d'active ou des réservistes, des acteurs de la sécurité civile comme les pompiers, les associations d'anciens combattants et de mémoire, des réservistes de l'éducation nationale, des juristes, des étudiants en médecine ou des professions médicales, notamment.

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