Intervention de Jean-Baptiste Carpentier

Réunion du jeudi 15 février 2018 à 9h40
Commission d'enquête chargée d'examiner les décisions de l'État en matière de politique industrielle, au regard des fusions d'entreprises intervenues récemment, notamment dans les cas d'alstom, d'alcatel et de stx, ainsi que les moyens susceptibles de protéger nos fleurons industriels nationaux dans un contexte commercial mondialisé

Jean-Baptiste Carpentier, ancien commissaire à l'information stratégique et à la sécurité économique :

Ce n'est pas moi qui vous dirai le contraire puisque je me suis battu pour moderniser ce dispositif. Néanmoins, il faut faire avec cette loi de blocage qui existe et est appliquée dans sa rédaction actuelle, y compris par les autorités judiciaires qui, à plusieurs reprises ont pris contact avec nous de façon très informelle pour examiner dans quelle mesure telle ou telle demande d'une autorité judiciaire étrangère était susceptible ou non de porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation, si elle entrait dans le cadre de l'entraide judiciaire ou si elle était soumise à la loi de blocage.

En outre, cette loi de blocage présente, malgré ses défauts, un véritable intérêt moins comme outil strictement juridique – car il faudrait pour cela qu'elle soit reconnue par nos interlocuteurs étrangers, et je ne suis pas sûr en l'occurrence qu'elle suffise à arrêter les juges américains – que comme instrument permettant que s'établisse un dialogue à trois entre l'autorité étrangère demanderesse, l'entreprise concernée et l'État.

En réalité, le terme de loi de blocage ne traduit ici qu'imparfaitement la notion de blocking statute, car sa principale vertu, je l'ai dit, est de permettre de trouver à trois – pour éviter le rapport de force trop déséquilibré d'une discussion où n'auraient part que l'entreprise et le juge étranger – un terrain d'entente qui tienne compte des exigences légitimes de l'autorité étrangère, laquelle a le plus souvent de réels motifs de s'intéresser à l'entreprise, tout en préservant nos intérêts nationaux.

J'ajoute enfin que la problématique des lois de blocage et de l'extraterritorialité se pose dans de nombreux pays avec lesquels nous entretenons des liens commerciaux – je pense notamment à la Chine et à l'Inde – et que nous ne devons pas nous focaliser sur les États-Unis. D'une certaine manière d'ailleurs, et au risque de paraître un peu cynique, il n'est pas dit que je ne préfère pas une discussion bilatérale avec les Américains qu'avec les autorités d'autres pays, avec lesquelles les négociations peuvent se révéler plus compliquées.

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