Intervention de Philippe Gosselin

Séance en hémicycle du mardi 25 juillet 2017 à 15h00
Confiance dans la vie publique — Article 2

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Gosselin :

Je dirai quelques mots pour abonder dans le sens de M. Abad. Personne ne peut être opposé à la volonté de lutter contre les conflits d'intérêts, c'est évident : nous devons assurer la transparence. Les missions dévolues au secteur public et au secteur privé sont de plus en plus sophistiquées, de plus en plus imbriquées, et la frontière qui les sépare est de plus en plus poreuse. Il faut mettre tout cela sur la table : ce n'est pas un problème pour nous.

Mais ce projet de loi fait peser sur nous une suspicion de principe, une forme de présomption de culpabilité. Les parlementaires sont quasiment présumés fautifs ; et, au-delà des intérêts privés, vous en rajoutez une couche en visant les conflits entre deux intérêts publics ! J'ai beau avoir eu une formation classique de juriste, je me perds dans l'intrication des intérêts publics. Je ne sais à quel GAJA – abréviation familière aux connaisseurs du droit administratif, désignant le recueil de commentaires des grands arrêts de la jurisprudence administrative – me vouer. Il me semble que même les notions d'intérêt général et d'établissement public sont remises à plat et ne valent plus.

C'est pourquoi l'inclusion, dans la définition du conflit d'intérêts, des interférences entre plusieurs intérêts publics, va vraiment trop loin. Si nous adoptions cet article, à l'avenir, un élu municipal qui siégerait dans notre assemblée ne pourrait pas participer à un débat budgétaire sur les missions de l'État ou des collectivités territoriales. Rétrospectivement, les députés de la précédente législature qui étaient aussi élus municipaux n'auraient pu prendre part au vote de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi NOTRe ». C'est une dérive sans fin, et nous ne savons pas jusqu'où elle nous emmènera.

Cela me semble par ailleurs totalement contradictoire avec la volonté d'avoir des élus « en phase avec la vraie vie », comme certains le disent encore, des élus ayant travaillé, des élus capables, après leur mandat, de reprendre une activité professionnelle. Il faudra que vous m'expliquiez comment de tels élus pourraient travailler avec les dispositions de cet article !

Enfin, comme l'a souligné Damien Abad, le Président de la République lui-même a choisi, pour entrer au Gouvernement, des gens compétents dans leur domaine. Faudra-t-il qu'eux aussi se déportent, au lieu de soutenir la discussion des textes qu'ils auront présentés en conseil des ministres ?

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