Intervention de Saïd Ahamada

Séance en hémicycle du mercredi 7 mars 2018 à 15h00
Convention d'entraide judiciaire en matière pénale avec les comores — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSaïd Ahamada :

Je l'ai entendu moi-même ici assez souvent !

Je voudrais m'arrêter un peu sur la coopération entre la France et les Comores. Si l'on veut avoir un effet sur les déplacements de population entre l'île d'Anjouan et Mayotte, il faut évidemment renforcer la coopération institutionnelle et financière avec l'Union des Comores. Pour ma part, trois problèmes m'inquiètent particulièrement, que la coopération entre nos deux pays doit aider à résoudre.

Premièrement, le bras de mer entre Anjouan et Mayotte – cela a été dit tout à l'heure – est aujourd'hui le cimetière marin le plus important du monde. L'endroit des mers où l'on meurt le plus se trouve dans nos eaux territoriales, chers collègues ! Ce point capital doit guider nos relations avec les Comores.

Deuxièmement, le nombre de mineurs isolés – certains de nos collègues l'ont rappelé – sur l'île de Mayotte est estimé à 5 000, mais est à mon avis bien supérieur en réalité. Cela doit nous conduire à nous interroger sur la capacité d'accueil, d'acceptation et d'intégration de notre pays, qui est le pays des droits de l'homme – nous en reparlerons dans le cadre de l'examen du projet de loi sur l'asile et l'immigration.

Troisièmement, le problème de la délinquance à Mayotte ne peut être imputé uniquement à ces flux migratoires. Ses causes sont bien plus profondes que cela. Je salue l'initiative ayant conduit à la constitution d'une mission d'information sur la situation à Mayotte et dans les Comores indépendantes, qui nous permettra d'avancer sur ce sujet.

Vous me direz : si cette convention ne sert pas à lutter contre l'immigration irrégulière, à quoi sert-elle ? Je vous répondrai que si elle avait été adoptée plus tôt, elle aurait permis d'avancer beaucoup plus vite dans l'affaire du crash du vol de la compagnie Yemenia. Cette catastrophe, que beaucoup ont oubliée, a causé en 2009 la mort de près de 160 personnes, dont une majorité de Français. À l'heure actuelle, la responsabilité de ce crash n'est toujours pas établie, non seulement parce que le Yémen est aujourd'hui un État quasi-failli, mais aussi parce qu'aucun juge n'a pu se rendre aux Comores pour l'application de la commission rogatoire internationale.

Le Président de l'Union des Comores a accepté que des magistrats se rendent aux Comores dans le cadre de cette commission rogatoire. Je l'en remercie. J'espère que nous pourrons arriver au terme des investigations sur l'épisode douloureux pour nos deux pays que représente ce crash, afin que les familles des victimes puissent faire leur deuil.

Je vous appelle donc, mes chers collègues, à voter ce texte afin que cette convention entre en vigueur. J'insiste néanmoins sur la nécessité d'avoir une vision plus large de la situation des Comores, sans se focaliser sur les flux migratoires entre Anjouan et Mayotte, afin de nouer une véritable coopération bilatérale avec ce pays qui le mérite.

Nous attendons beaucoup des Comores, mais les Comores attendent aussi beaucoup de nous. Notre pays doit enfin être à la hauteur de son titre de patrie des droits de l'homme.

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