Intervention de Agnès Buzyn

Séance en hémicycle du jeudi 8 mars 2018 à 9h30
Reconnaissance sociale des aidants — Présentation

Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé :

En conséquence, je veux vous proposer une approche qui n'abandonne aucun de nos aidants et qui réponde à tous leurs besoins, à chaque étape de leur parcours, depuis l'information sur leurs droits, l'accès à la santé, jusqu'aux solutions de répit, en passant, comme vous l'avez très justement souligné, par le soutien dans leur vie professionnelle.

Travaillons ensemble à cette stratégie pour encourager les initiatives innovantes, tout en garantissant des droits effectifs en faveur de tous les aidants, quel que soit le motif de la perte d'autonomie de la personne aidée. Ainsi, ce n'est pas seulement l'aidant que nous rassurerons, mais aussi la personne aidée.

À ce titre, vous le savez, une mission a été confiée à Mme Dominique Gillot pour faciliter l'embauche et le maintien en emploi des personnes en situation de handicap, ainsi que leurs aidants. Cette mission devrait rendre ses conclusions dans les prochaines semaines.

Sur cette base, en nous appuyant sur les discussions que nous avons eues avec vous, au Parlement, ainsi que sur les travaux techniques que mes services mènent en ce moment, nous présenterons un ensemble de mesures d'ici l'été, après avoir consulté l'ensemble des acteurs concernés, y compris les partenaires sociaux – dès lors que des mesures concernent l'emploi et les entreprises.

Ces mesures devront servir cinq objectifs. Nous devrons, tout d'abord, mieux informer et communiquer autour des droits des aidants : en effet, je ne peux que constater la méconnaissance par les proches aidants de leurs droits et des dispositifs mis en place pour les accompagner. J'ai aussi à l'esprit la réticence, la culpabilité, parfois la honte, que certains éprouvent à l'idée de réclamer leurs droits. N'oublions jamais que la République n'est pas un lieu de charité, mais de justice. Nous devrons accompagner et soutenir les aidants au quotidien, en mobilisant tous les acteurs : pairs, établissements sociaux et médico-sociaux, ou encore services à domicile.

Nous devrons également mieux repérer et prévenir les risques pesant sur les aidants : cela concerne bien sûr les conjoints de personnes âgées, auxquels une attention particulière doit être apportée, mais aussi les aidants salariés exposés au risque de fatigue, ou de maladie. Cela concerne aussi les jeunes aidants de parents handicapés ou malades, qui peuvent être particulièrement exposés ou vulnérables.

Nous devrons développer les solutions de répit, pour permettre aux aidants de souffler sans crainte, et sans culpabilité, grâce au maintien d'un accompagnement adapté de la personne aidée. Enfin, nous devrons améliorer l'inclusion professionnelle des aidants en facilitant leur maintien ou leur retour dans l'emploi, par la mobilisation notamment des employeurs en vue de mieux tenir compte de ces problématiques.

Monsieur le député, à la lecture de votre proposition m'est revenu en mémoire le personnage de Pauline, cette grand-mère grabataire que peint avec réalisme, et même crudité, Jean Giono dans son roman Mort d'un personnage. Son petit-fils, Angelo, comprend ce qu'est aimer le jour où il l'aide au quotidien, où il l'assiste dans ses soins les plus intimes et les plus indicibles. Permettez-moi d'en lire un extrait : « Pendant des années, je peux dire jusqu'à sa mort, j'ai été à l'affût de son regard. [… ] Chaque fois, c'était pour regarder mon front et mes yeux. Plus tard, j'ai cherché son regard comme Orphée Eurydice. »

Votre proposition, monsieur le député, est salutaire, et vous savez que je partage l'intention qui vous anime et qui est tout à votre honneur. Toutefois, je ne puis soutenir dans l'immédiat votre texte qui, par ailleurs, laisse dans l'incertitude le financement de certaines mesures. Le Gouvernement propose donc un renvoi en commission.

Dans le même temps, le Gouvernement s'engage, je m'engage, monsieur le député, à avancer des propositions abordant la problématique des aidants familiaux dans son ensemble et à ce que votre assemblée examine des mesures législatives dans les prochains mois.

Redonnons ensemble la confiance aux plus fragiles de nos concitoyens et à leurs proches, ces héros sans voix qui les assistent au quotidien. À cette fin, monsieur le député, faisons preuve, assurément, de résolution, mais prenons aussi le temps de la concertation. Si les aidants attendent de nous de l'action, il s'agit surtout d'une action réfléchie et effective. Je compte sur vous pour donner à notre réflexion commune le temps qu'elle exige, afin qu'elle soit digne de nos responsabilités et des attentes.

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