Intervention de Stéphane Demilly

Séance en hémicycle du mardi 20 mars 2018 à 21h30
Programmation militaire pour les années 2019 à 2025 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Demilly :

C'est un doux euphémisme de rappeler que les menaces auxquelles la France est confrontée s'exercent aussi sur nos voisins européens.

Permettez-moi de citer un ancien et célèbre député, qui parlait déjà d'une armée européenne : « Je vais plus loin. Je ne dis pas seulement : C'est un but réalisable, je dis : C'est un but inévitable, on peut en retarder ou en hâter l'avènement, voilà tout. » Ces propos de Victor Hugo, au congrès de la paix de 1849 me reviennent à l'esprit en ce début de discussion.

Il ajoutait : « Sans perdre vos qualités distinctes et votre glorieuse individualité, vous vous fondrez [… ] dans une unité supérieure et vous constituerez la fraternité européenne. » C'était il y a 170 ans.

Oui, il est urgent de travailler à l'avènement d'une véritable culture stratégique européenne. La France a toujours joué un rôle majeur dans cette construction et se doit de poursuivre son engagement en faveur des coopérations et des mutualisations, en vue de provoquer des effets d'entraînement sur nos partenaires européens.

Ce n'est qu'ensemble que nous pourrons éviter les décrochages technologiques face aux grands de ce monde qui investissent des montants records dans leurs armées, face aux États-Unis dont le budget est dix fois supérieur au nôtre ou encore face à la Chine, dont le budget est le quadruple du nôtre. D'autant que ces évolutions entraînent une course aux armements et des démonstrations de force particulièrement préoccupantes.

Notre capacité à peser, et donc notre avenir, dépendront de notre énergie à développer une industrie et une recherche communes. Ce n'est qu'à cet échelon que nous garantirons sérieusement notre souveraineté dans un monde multipolaire où les continents l'emportent sur les États. À l'évidence, ce prisme s'applique notamment aux nouveaux théâtres d'affrontement que constituent les espaces numérique et exo-atmosphérique.

Nous devons travailler à l'interopérabilité de nos matériels et réorganiser les coopérations industrielles et technologiques en ouvrant la voie à un système de préférence européenne. Dans ce cadre, le fonds européen de défense représente un levier formidable pour mutualiser davantage nos dépenses et accroître nos capacités militaires.

Vous l'avez aisément déduit de mes propos : le groupe UDI, Agir et indépendants soutient globalement ce projet de loi de programmation militaire, qui entend combler partiellement les lacunes des précédentes décennies.

Pour conclure, je ne peux que vous inviter à garder à l'esprit que la période 2019-2025 offrira une occasion rare de construire cette Europe de la défense, cette « armée européenne » que Churchill appelait de ses voeux en 1950, « rangée sous la direction d'un commandement unifié » et « soumise à un contrôle démocratique européen ». Comme il le disait, quatre ans plus tôt, à l'université de Zurich : « Que l'Europe se lève ! » C'est – il avait raison – la meilleure garantie de paix, de stabilité et de sécurité.

Soixante-dix ans plus tard, nous avons la possibilité d'écrire l'une des plus belles pages de l'histoire contemporaine. Tâchons de ne pas l'oublier.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.