Intervention de Jean-Luc Mélenchon

Séance en hémicycle du mercredi 21 mars 2018 à 15h00
Programmation militaire pour les années 2019 à 2025 — Article 2 et rapport annexé

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Luc Mélenchon :

Sans vouloir reprendre dans tous ses aspects le débat que nous avons déjà eu hier, je reviens sur l'idée qu'il s'agit d'articuler les capacités françaises avec la capacité de coopération européenne autonome. Cette autonomie n'existe pas, ne peut pas exister, n'existera jamais, comme vient de le dire excellemment notre collègue à l'instant.

La raison en est fort simple : nous en avons déjà discuté dans le passé, la représentation nationale s'est déjà exprimée une première fois – je pense à la lointaine Communauté européenne de défense – et aujourd'hui, pour les mêmes raisons, cela n'est pas possible. En effet, tous les textes, toutes les dispositions de tous les pays d'Europe, à l'exception de la France, sont intégrés directement dans le dispositif de l'OTAN, donc à son commandement, et donc à son commandement politique, qui est nécessairement nord-américain.

Par ailleurs, sur le plan du matériel lui-même, lorsque les Européens partagent des constructions faites avec du matériel nord-américain, les Américains considèrent que cela constitue une extension de leur propre souveraineté. Ils peuvent ainsi décider que nous ne pouvons pas nous en servir, ou que nous n'avons pas le droit de nous en servir, même si c'est nous qui décidons et que cela n'a rien à voir avec eux. Ils le font déjà pour de modestes billets d'un ou de cinq dollars, alors à plus forte raison pour des composants de cette sensibilité !

Enfin, dernier élément, la totalité des actes inter-opérationnels entre les armements qui sont mis en oeuvre dépendent de technologies nord-américaines. Les Français ont fait, à mon avis, une erreur tragique en acceptant d'intégrer Microsoft dans un certain nombre de nos installations, ce qui les met directement dans la main du commanditaire ultime.

Pour conclure, supposons que l'on oublie tout ce que je viens de dire à l'instant et qu'il existe une volonté chez tous nos partenaires d'acheter non pas des F-35 mais des Rafale, parce que, tout d'un coup, ils auraient été convaincus que cela les rendrait indépendants. Oublions donc tout cela : comment conciliez-vous d'une part l'idée que notre stratégie de dissuasion repose sur l'emploi de la force nucléaire et l'absence de théâtre d'opération en Europe, et d'autre part l'installation de bases antimissiles en Pologne, approuvée par le président Hollande contre toute raison ? Car clairement, ces installations signifient que l'Europe devient un théâtre d'opération et que nous désignons nos adversaires par la direction de ces installations !

Ce n'est pas une problématique française. Ce n'est pas une manière de voir pour des Français. C'est une manière de voir pour des Allemands, pour des Polonais, pour des Hongrois s'ils le veulent, mais ce n'est pas français !

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