Intervention de Florence Parly

Séance en hémicycle du jeudi 22 mars 2018 à 21h30
Programmation militaire pour les années 2019 à 2025 — Article 18

Florence Parly, ministre des armées :

En amont de l'élection, nous avons cherché à définir un seuil – à vrai dire, c'est le Conseil constitutionnel qui nous y a quelque peu invités. Le Gouvernement l'avait imaginé à 3 500 habitants. Votre commission et votre rapporteur ont considéré – le Gouvernement n'y étant d'ailleurs pas hostile – qu'il devait être révisé à la hausse en le portant à 9 000. Pourquoi ? Parce qu'au-delà de ce seuil, les élus municipaux sont automatiquement grands électeurs. Nous aurions alors retrouvé la contradiction entre le respect du principe de neutralité et cette qualité-là.

Nous avons également veillé à ce que les militaires ne soient pas éligibles au-delà du grade de capitaine inclus – cette question n'a pas encore été abordée mais je ne m'exprimerai pas à nouveau lorsque nous examinerons les amendements à ce propos. Pourquoi ? Parce qu'au-delà, nous considérons qu'un commandant – ou plus haut gradé – exerce dans le ressort de sa garnison, de son régiment, de son lieu de travail des responsabilités qui ne le mettent pas à l'abri – pardonnez-moi – de conflits d'intérêts.

Nous avons également veillé à ce que nous puissions gérer le mieux possible, en aval de l'élection, le principe d'interdiction d'affiliation à un parti politique. Le statut militaire prévoit d'ores et déjà qu'il soit temporairement suspendu en période de campagne électorale : le militaire a le droit de faire campagne mais après l'élection, s'il veut conserver son affiliation à un parti politique, il ne peut pas rester militaire d'active et il doit demander son détachement, lequel est de droit.

Nous avons aussi tenté de gérer de la manière la plus optimale possible la question des nécessités opérationnelles, qui doivent toujours prévaloir. Or, le code électoral prévoit un certain nombre de dispositions qui garantissent l'exercice d'un mandat – je songe, par exemple, aux crédits d'heures, qui s'appliqueront naturellement aux militaires élus dans les conditions prévues par l'article 18 mais sous réserve que le permettent les nécessités opérationnelles, appréciées par le commandement.

Enfin, la question des conseillers communautaires s'est posée. Le Parlement a certes créé les intercommunalités depuis longtemps mais elles sont de plus en plus nombreuses et leurs compétences sont de plus en plus larges. Comme les conseillers municipaux, les conseillers communautaires sont élus – depuis peu – au suffrage universel direct. Nous devions donc à nouveau nous poser la question du seuil en deçà duquel les militaires, tout en restant militaires d'active, peuvent exercer ces responsabilités-là. Nous n'avions pas forcément décelé ce problème et c'est l'un des grands apports de notre débat avec votre commission. C'est votre assemblée qui l'a soulevé et, après de longs débats, le seuil a été fixé à 15 000 habitants. Pour les mêmes raisons que précédemment évoquées, c'est un seuil qui nous paraît susceptible de concilier la disponibilité opérationnelle du militaire, sa neutralité et son engagement civique.

J'ai bien conscience que, tous ensemble, nous tâtonnons un peu puisque nous transformons de façon assez radicale le droit qui était applicable aux militaires depuis des dizaines et des dizaines d'années. Dans ces conditions, il se peut, certes, que nous n'ayons pas parfaitement fixé le curseur mais, quoi qu'il en soit, cet article 18 constitue un immense progrès. Je me félicite de la méthode de travail, extrêmement pragmatique, qui a été adoptée. Dieu sait que vous avez été nombreux à intervenir parce que tous, en tant qu'élus, vous vous sentez concernés par les droits électoraux de cette catégorie de Français que sont nos militaires.

Pour terminer, je souhaite vous remercier pour la contribution très positive de l'Assemblée nationale à l'élaboration de cet article 18. J'espère que le point d'équilibre qu'il constitue après avoir été modifié en commission permettra à un nombre croissant de militaires de s'impliquer de plus en plus – car ils le font déjà, par d'autres canaux – dans la vie civique et citoyenne. L'article 18 les invite à le faire, cette fois-ci, dans un cadre que je n'ai pas besoin de vous décrire puisque vous êtes nombreux, ici, à exercer des responsabilités municipales. Je salue l'immense progrès démocratique et civique que cet article 18 permettra de faire.

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