Intervention de Sabine Rubin

Réunion du mardi 20 mars 2018 à 17h05
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSabine Rubin :

Une fois n'est pas coutume, j'ai un point d'accord avec M. Blanquer qui a déclaré qu'« il n'est pas tout à fait normal que n'importe qui puisse ouvrir une école ». Je m'inquiète néanmoins de la hausse sensible du nombre d'établissements privés hors contrat : on en dénombre en effet 1 300, mais ce concept semble séduire de plus en plus puisque leur nombre a augmenté de 25 % en cinq ans. Cela m'évoque la pensée de Noam Chomsky : on organise le démantèlement de l'école publique, ce qui encourage le départ vers le privé.

C'est l'une des raisons pour lesquelles le groupe La France insoumise s'oppose au principe même des établissements hors contrat. Il existe une raison plus fondamentale encore : ces établissements se placent hors du contrat de société qui nous unit tous autour du socle commun que constitue l'école républicaine. Pour recréer ce lien social que nous appelons tous de nos voeux, il est selon nous essentiel que les enfants puissent grandir ensemble, sans être enfermés avec des enfants ayant la même origine sociale, culturelle ou religieuse. Pour ceux qui souhaitent que leurs enfants bénéficient de pédagogies alternatives, il appartient à l'éducation nationale de reprendre les expérimentations positives afin que chaque enseignant dispose d'une palette d'outils pédagogiques lui permettant de répondre au mieux aux besoins des différents élèves. À cet égard, je distingue entre les contenus et les outils pédagogiques : les contenus doivent être communs. Tout cela pose la question du système de formation des enseignants. Tels sont les points fondamentaux d'un véritable programme pour l'éducation.

Ceci étant posé, la proposition de loi que nous examinons, qui vise à renforcer le contrôle par l'État des écoles hors contrat, nous paraît bien timorée. En effet, la simplification que vous visez ne sert qu'à harmoniser le régime d'ouverture des trois types d'établissements – primaire, secondaire et technique – et à uniformiser les conditions à remplir pour y enseigner. Elle n'apporte aucunement la garantie d'un contrôle efficace.

La simplification du régime de déclaration ne nous semble pas nécessaire compte tenu de l'augmentation incessante du nombre d'établissements. Ensuite, cette proposition de loi, qui imposerait à l'établissement de transmettre le nom des enseignants qui y interviennent, ne prévoit qu'a posteriori des obligations de contrôle par les académies, dans les trois mois en cas d'opposition et dans l'année qui suit l'ouverture. Comme M. Pupponi à l'instant, nous souhaiterions a minima un régime d'autorisation préalable à l'ouverture pour que le contrôle soit vraiment efficace. Peut-être soutiendrions-nous alors ces nouvelles obligations qui incombent à l'État.

Pourtant, de l'aveu même des rédacteurs de ce texte, il serait alors impossible d'augmenter le nombre des contrôles car le personnel académique n'est pas assez nombreux. Nous ne souscrivons naturellement pas à cet aveu d'impuissance, d'autant plus que le Gouvernement vient d'annoncer hier le renforcement du contrôle des chômeurs : certes, c'est un sujet différent, mais le fait est que de l'argent est disponible. Les quatre cents agents de contrôle de Pôle Emploi pourraient aussi bien être utilisés à des fins de contrôle par l'éducation nationale. Quoi qu'il en soit, il s'agit une nouvelle fois d'un choix politique masqué en constat d'impuissance ; le Gouvernement est plus suspicieux envers les chômeurs qu'envers ceux qui créent des écoles…

C'est grave, car les établissements hors contrat ont des pratiques douteuses, voire des plus dangereuses pour nos enfants – c'est avéré. J'en veux pour preuve le rapport de la sénatrice Annick Billon, d'où il ressort qu'un quart des contrôles effectués en 2016-2017 a fait apparaître des manquements, parmi lesquels l'occultation de certains pans du savoir et l'absence totale de preuves d'enseignements scolaires.

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