Intervention de Marietta Karamanli

Séance en hémicycle du mardi 27 mars 2018 à 15h00
Protection des savoir-faire et des informations commerciales — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarietta Karamanli :

Madame la présidente, madame la garde des sceaux, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, en 2014, un projet de loi avait prévu de protéger le « secret des affaires » en le définissant comme « une information non publique, qui fait l'objet de mesures de protection raisonnables » et qui a « une valeur économique ». Ce texte avait suscité de grandes interrogations et de vives critiques. Le noeud de l'affaire, si j'ose dire, était que le secret des affaires relevait de la libre interprétation des entreprises concernées. La crainte qui s'exprimait alors était qu'un juge saisi par une entreprise aurait été appelé à devenir le décideur unique de la vérité, statuant sur l'intérêt ou non d'une information, fût-elle utile à la préservation de l'intérêt général, de la santé des patients, des droits des consommateurs ou encore de notre environnement.

Parallèlement à cette démarche, l'Union européenne avait lancé ses propres travaux à la fin de l'année 2013. En 2016, un texte visant à donner aux entreprises un même cadre juridique protecteur a été adopté à la majorité par le Parlement européen. Ce cadre répond à la nécessité d'une rationalisation en la matière. En effet, seule la Suède dispose à ce jour d'un outil législatif spécifique, la plupart des autres États membres de l'Union européenne garantissant la protection en question au travers de dispositions diverses relevant, de façon éclatée, du droit du travail, du droit pénal ou du droit de la propriété intellectuelle, voire de dispositions générales relatives à la mise en jeu de la responsabilité civile.

Compte tenu des différences entre ces deux processus, français et européen, un équilibre nouveau est devenu impératif ; une conciliation entre deux objectifs légitimes est devenue nécessaire. S'il est bon, en effet, de protéger les actifs et le savoir des entreprises, sachant que, chaque année, une entreprise sur cinq est victime du vol d'un secret d'affaires, le texte européen a été enrichi d'une nouvelle vocation : protéger le travail des journalistes et les lanceurs d'alerte de façon plus explicite.

D'un côté, la directive introduit la notion de « secret d'affaires », qui vise les informations secrètes qui ont une valeur commerciale du fait même de leur caractère secret et qui ont été soumises à des mesures raisonnables pour être gardées secrètes. De l'autre, il est indiqué dans le texte de la directive que celle-ci « ne porte pas atteinte à l'exercice du droit à la liberté d'expression et d'information [… ], y compris le respect de la liberté et du pluralisme des médias », ni « à l'application de règles de l'Union ou de règles nationales exigeant des détenteurs de secrets d'affaires qu'ils révèlent, pour des motifs d'intérêt public, des informations, y compris des secrets d'affaires, au public ou aux autorités administratives ou judiciaires pour l'exercice des fonctions de ces autorités ».

L'Union européenne ayant adopté ladite directive, la majorité s'est saisie de la question et a déposé une proposition de loi, dans le cadre d'un travail de co-construction – nous le supposons – avec l'exécutif.

J'en viens aux raisons qui nous semblent devoir commander que la proposition de loi soit renvoyée à un nouvel examen en commission. Loin d'être un refus de principe, ce renvoi répond, selon nous, à la nécessité à la fois de poursuivre le travail d'analyse, d'améliorer l'équilibre entre les principes énoncés précédemment et de faire en sorte que notre assemblée s'approprie au mieux cette proposition de loi par un examen réellement ouvert, prenant en compte les demandes des différents groupes et des nombreux acteurs qui nous ont saisis.

Mes premières observations concernent la procédure choisie.

Comme c'est le cas pour toute proposition de loi, nous ne disposons pas d'une étude d'impact…

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