Intervention de Stéphane Peu

Séance en hémicycle du mardi 27 mars 2018 à 21h30
Protection des savoir-faire et des informations commerciales — Article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Peu :

Le sous-amendement no 89 concerne la notion de bonne foi. Le texte prévoit une dérogation à la protection du secret lorsque celui-ci a été divulgué pour « révéler de bonne foi une faute, un acte répréhensible ou une activité illégale, etc. ». Dans la rédaction actuelle, la bonne foi du lanceur d'alerte n'est jamais présumée. Cette formulation crée une insécurité juridique certaine pour tous les lanceurs d'alerte ou les syndicalistes et constituera immanquablement un frein à de futures révélations. Qui peut imaginer que le lanceur d'alerte, souvent isolé, souvent seul, saura défendre sa bonne foi face à une armada d'avocats engagés par la multinationale dont il aura dévoilé les secrets ? En conséquence, le sous-amendement vise à supprimer la mention de la bonne foi afin de résorber le déséquilibre manifeste entre les intérêts économiques des entreprises et les lanceurs d'alerte au détriment de ces derniers.

Il ne s'agit pas d'une préoccupation isolée, puisque le rapport des Nations unies sur la liberté d'expression publié en 2015 ne disait pas autre chose. Je vous en cite un extrait : « la motivation du lanceur d'alerte au moment où il divulgue des informations ne devrait pas être prise en considération pour déterminer s'il a le droit à une protection. La détermination de l'admissibilité au bénéfice d'une protection doit reposer sur la détermination de l'intérêt public que présentent les informations faisant l'objet de l'alerte ». Notre sous-amendement oeuvre en ce sens.

Le sous-amendement no 90 propose d'élargir la notion d'activité en ajoutant au terme « illégale » celui de « légale ». Un lanceur d'alerte peut révéler une situation qui, sans être illégale, n'en est pas moins immorale, amorale ou contraire à l'éthique de responsabilité – je pense par exemple aux scandales liés à l'optimisation fiscale, qui n'est pas une pratique illégale mais qui est répréhensible au regard de la morale publique.

Les révélations d'Antoine Deltour, qui est à l'origine de l'affaire Luxleaks, ne portent pas sur des faits illégaux. Pourtant, chacun de nous salue le courage dont il a fait preuve et l'intérêt certain de ses révélations.

En mentionnant l'activité légale ou illégale, ce sous-amendement permet d'élargir le champ de la protection dont peuvent bénéficier les lanceurs d'alerte.

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