Intervention de Sabine Lavorel

Réunion du jeudi 15 mars 2018 à 9h00
Mission d'information sur la gestion des évènements climatiques majeurs dans les zones littorales de l'hexagone et des outre-mer

Sabine Lavorel, maître de conférences en droit public à l'Université de Grenoble :

Je dirige un projet de recherche sur les stratégies françaises dans le Pacifique sud face au changement climatique. L'un des pans de notre recherche, principalement menée par des politologues et des anthropologues, vise à modéliser les flux qui seraient liés au climat dans cette région, en déterminant les zones de départ et les zones de réinstallation. Cela nous a amenés à nous interroger sur le sujet que vous évoquez, et tous les juristes n'ont pas la même position. Je vous réponds donc, à titre personnel, que le terme de « réfugiés » ne me convient pas en l'espèce, car je considère qu'il s'applique aux personnes visées par la Convention de Genève de 1951, les réfugiés politiques.

Je ne pense pas qu'il faille élargir la protection de la Convention de Genève à des personnes qui seraient considérées comme des « réfugiés climatiques ». Je sais en effet – c'est en partie le résultat de nos travaux – qu'il est extrêmement difficile de déterminer une cause proprement climatique à un déplacement individuel ou au déplacement d'un groupe. Un déplacement est toujours multifactoriel et la cause climatique se manifestera par une cause économique : je suis paysan, je cultive un champ, mais la salinisation de mon champ en raison d'inondations répétées fait que je ne peux plus le cultiver – est-ce une cause climatique qui me fait partir, ou est-ce une cause économique ? Ces choses sont extrêmement compliquées, et je suis au regret de ne pouvoir vous donner une réponse sur la définition d'un réfugié climatique, dont je ne suis pas certaine que l'on puisse véritablement la déterminer. C'est pourquoi je considère qu'il ne peut y avoir d'instrument international universel propre à des réfugiés ou à des personnes déplacées pour des questions climatiques ou environnementales.

En revanche, et c'est la proposition vers laquelle nous nous acheminons, il sera intéressant d'apprécier si des conventions régionales seraient adaptées à des régions où existent des flux spécifiques entre des zones de déplacement et des zones de réinstallation, en tenant compte de ce que chaque État de la zone concernée est prêt à faire en termes d'accueil, de politique d'asile et éventuellement de politique d'accueil temporaire si les individus concernés sont amenés à repartir. Pour moi, la solution ne réside pas dans un droit universel des « réfugiés climatiques », mais dans des solutions adaptées au niveau régional.

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