Intervention de Stéphane Mazars

Séance en hémicycle du mardi 3 avril 2018 à 15h00
Débat sur l'application d'une procédure d'amende forfaitaire au délit d'usage illicite de stupéfiants

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Mazars :

… mais parce qu'il me semble nécessaire que le simple usage de produits stupéfiants conserve le caractère d'un délit. Il ne faut pas banaliser un comportement qui alimente les réseaux, les trafics, et qui, en tout état de cause, met gravement en danger la santé de nos concitoyens, notamment les plus jeunes.

La notion d'amende forfaitaire délictuelle a été introduite dans notre droit par la loi du 18 novembre 2016, qui institue une amende forfaitaire délictuelle pour sanctionner certaines infractions routières. En l'espèce, cette formule présente l'avantage d'uniformiser la réponse pénale sur l'ensemble du territoire national. Cela permettrait d'éviter l'incompréhension des consommateurs délinquants, qui à l'heure actuelle sont davantage poursuivis et sanctionnés dans le Tarn ou l'Aveyron que dans les grandes métropoles.

Le procureur de la République et les services d'enquête pourraient cependant déroger, dans certaines situations, au principe de l'amende, en décidant de placer le consommateur en garde à vue, afin de bénéficier des moyens d'investigation nécessaires au démantèlement de certains trafics.

Éric Poulliat préconise en outre, pour améliorer l'efficacité et la sécurité de la procédure relative à ce nouveau dispositif, de doter les services d'enquêtes d'outils tels que les tablettes NEO, ainsi que de tests de dépistages et de balances. Il est également indispensable – je suis d'accord avec notre rapport sur ce point – de faire évoluer la règle de la récidive pour mieux personnaliser la réponse aux consommateurs qui réitèrent l'infraction d'usage.

Le parquet conservera la possibilité d'apprécier l'opportunité des poursuites : c'est tout l'intérêt du maintien du caractère délictuel de l'usage de produits stupéfiants. Il pourra ainsi décider au mieux de la réponse à apporter à chaque consommateur, dans l'intérêt de la société, mais aussi du délinquant lui-même, par les obligations de soins.

Cette amende délictuelle forfaitaire pour l'usage de produits stupéfiants paraît d'autant plus opportune qu'elle serait fort utile à la police de sécurité du quotidien, dont l'objectif est la reconquête de certains de nos quartiers – qui sont, on le sait, particulièrement gangrenés par le trafic de produits stupéfiants. Le ministre de l'intérieur a d'ailleurs rappelé, lors de la présentation de la police de sécurité du quotidien, que la forfaitisation de certaines infractions permet de les sanctionner immédiatement, donc efficacement. Cette formule permettrait en outre de renforcer la présence effective des forces de l'ordre sur le terrain, en lien avec la population : à l'heure actuelle, les policiers et les gendarmes passent plus de 1 million d'heures par an à enquêter sur l'usage de stupéfiants, pour seulement 33 000 condamnations.

Enfin, faut-il expérimenter cette mesure de façon limitée dans le temps et dans l'espace, comme le préconise le rapport ? Cela ne me semble pas opportun. Il est temps, au contraire, de mettre en place une réponse pénale pérenne, généralisée sur l'ensemble du territoire de notre République.

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