Intervention de Martial Saddier

Séance en hémicycle du jeudi 5 avril 2018 à 15h00
Accueil des gens du voyage et lutte contre les installations illicites — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartial Saddier :

Nous souhaitons également réintroduire dans la proposition de loi la suppression de la procédure de consignation des fonds à l'encontre des communes et EPCI ne respectant pas le schéma départemental d'accueil et d'habitat des gens du voyage. Prévu par la loi du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté, ce dispositif ne favorise en aucun cas la création d'aires ou de terrains d'accueil. De surcroît, il est bien trop coercitif à l'encontre des collectivités territoriales et de leurs groupements. Comme l'a démontré la Cour des comptes, la principale difficulté réside dans le financement des places en aire d'accueil, dont elle estime le coût unitaire moyen à 35 000 euros. Cette difficulté est aggravée par la baisse des subventions de l'État – dans certains départements, les ponctions opérées depuis plusieurs années au titre du fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales placent les élus locaux dans des situations extrêmement difficiles.

Avec ce texte, nous avons également voulu répondre aux problèmes que ceux-ci rencontrent lors des grands rassemblements et des grands passages, grâce à la création d'un mécanisme d'information permettant aux autorités publiques de les anticiper et de mieux les organiser. Je le répète : lorsque 200 ou 250 caravanes arrivent à l'improviste dans un département, toute la saison touristique est mise en l'air, et avec elle l'organisation du schéma départemental. Nous défendrons donc des amendements visant à rétablir l'article 3 bis.

Mes chers collègues, je le répète, ce texte n'affaiblit en rien les obligations incombant aux collectivités territoriales. Si vous voulez que celles-ci s'y conforment plus rapidement, il faut précisément qu'elles aient en retour l'assurance que ceux qui arrivent sur leur territoire respectent la loi. Tel est le fondement de l'équilibre sur lequel repose la proposition de loi adoptée par le Sénat.

Lors de nos débats en commission, plusieurs d'entre nous ont mis l'accent sur la nécessité de moderniser les procédures d'évacuation des stationnements illicites. Si, sur le terrain, elles sont bel et bien mises en oeuvre, leur application effective requiert des délais particulièrement longs, sans même parler des terrains privés, sur lesquels les évacuations ont lieu pratiquement hors délai – mais les gens du voyage se concentrent davantage sur les terrains publics.

En outre, il est de plus en plus fréquent que des communautés de gens du voyage, une fois expulsées par les forces de l'ordre, se réinstallent sur un autre terrain – il suffit de changer de parcelle cadastrée – dans la même commune ou à quelques kilomètres, dans une commune voisine. Il faut alors reprendre à zéro la procédure prévue par la loi Besson. Pour remédier à ce que l'on appelle – selon une expression, employée par les sénateurs, qui n'a rien de péjoratif – les « sauts de puce », nous souhaitons réintroduire dans la proposition de loi l'extension du périmètre d'application du maintien de la mise en demeure de quitter les lieux à tout le territoire de la commune ou de l'EPCI. Il faut également ramener le délai d'exécution des procédures administratives d'évacuation à vingt-quatre heures en cas de nouveau stationnement illicite.

Autre mesure que le rétablissement de l'article 5, dans la rédaction issue du Sénat, vise à défendre : l'élargissement des motifs de mise en demeure aux atteintes au droit de propriété, à la liberté d'aller et venir des autres habitants, à la liberté du commerce et de l'industrie, et à la continuité du service public. En effet, il n'est pas acceptable que des terrains agricoles soient détruits, que des aires d'usine destinées aux gens qui viennent y travailler le matin soient occupées et que des zones commerciales ne puissent pas ouvrir le matin car leurs parkings sont occupés. Nous proposons donc la reconnaissance d'une atteinte à l'activité économique.

Nous soutiendrons par conséquent des amendements visant à rétablir le doublement des peines encourues en cas d'occupation illicite d'un terrain, en les portant à douze mois d'emprisonnement et 7 500 euros d'amende, ainsi que la possibilité de saisir les véhicules tracteurs et non pas l'habitation elle-même – soit dit pour corriger une erreur d'interprétation dont notre proposition de loi a fait l'objet.

Enfin, nous proposerons la création d'une circonstance aggravante applicable au délit de destruction, dégradation ou détérioration d'un bien appartenant à autrui, ainsi que celle d'un délit d'occupation habituelle en réunion sans titre du terrain d'autrui.

Chers collègues de la majorité, nous regrettons que vous ayez complètement vidé de sa substance, en commission, le texte issu du Sénat, en supprimant la plupart des dispositions de l'article 6 ainsi que six des onze articles qu'il comporte. Si l'examen de la proposition de loi est inscrit à l'ordre du jour d'une niche parlementaire réservée au groupe Les Républicains, dont Mme la rapporteure est membre, nous ne retrouvons rien, dans le texte que nous allons examiner, de la proposition de loi issue du Sénat. Sur le fond, nous estimons qu'il s'agit bien de notre proposition de loi ; sur la forme, si les dispositions du texte que nous proposons de rétablir ne le sont pas, nous serons amenés à voter contre.

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