Intervention de Thomas Rudigoz

Séance en hémicycle du mardi 17 avril 2018 à 15h00
Immigration maîtrisée droit d'asile effectif et intégration réussie — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaThomas Rudigoz :

Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, ministre de l'intérieur, madame la présidente de la commission, madame la rapporteure, mesdames les rapporteures pour avis, chers collègues, issu du préambule de notre Constitution, le droit d'asile a toujours été au coeur de notre tradition républicaine. Nous nous devons de nous garder des postures politiciennes, voire des récupérations politiciennes insupportables, à l'image de ce que vient de faire M. Chenu, sur des sujets qui ont trait aux grands idéaux de la République et aux droits fondamentaux des personnes.

Ce projet de loi entend répondre à des situations inédites, marquées par une forte hausse de la pression migratoire, laquelle ne devrait pas faiblir dans les prochaines années, bien au contraire. Nous devons tout mettre en oeuvre pour que les réfugiés éligibles à l'asile soient accueillis respectueusement. Or force est de reconnaître que notre dispositif d'accueil n'a pas été prévu pour faire face à un afflux aussi important de demandeurs.

Ainsi, le délai d'examen des demandes d'asile demeure encore trop long malgré les progrès de nos administrations et des associations compétentes, comme l'a rappelé très clairement M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur.

Par ailleurs, nous devons faire preuve de fermeté avec ceux qui ne justifient pas d'un droit au séjour, et qui ne doivent pas pouvoir demeurer illégalement sur notre territoire.

Le délai de traitement de la demande d'asile doit donc passer à six mois, s'alignant ainsi sur celui en vigueur chez nos voisins européens. C'est l'objectif de ce texte de loi, présenté par M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur. C'est également la traduction d'un engagement de campagne d'Emmanuel Macron, inscrit dans son programme : « Nous examinerons les demandes d'asile en moins de six mois, recours compris. C'est nécessaire pour accueillir dignement les réfugiés qui ont droit à la protection de la France, et les autres seront reconduits sans délai vers leur pays afin qu'ils ne deviennent pas des immigrés clandestins ».

Comme pour la loi rétablissant la confiance dans la vie politique, celle relative à la lutte contre le terrorisme, et tant d'autres lois que nous votons à un rythme soutenu depuis dix mois, ce texte répond à un engagement de campagne du candidat à l'élection présidentielle Emmanuel Macron et, par la suite, à un engagement des candidats de La République en marche aux élections législatives.

Le mot d'ordre de notre travail est de trouver un point d'équilibre : nous montrer généreux et solidaires tout en restant fermes, car le droit d'asile ne saurait être détourné de sa finalité.

Accorder l'asile, c'est donner une protection étatique à des personnes vulnérables. Ce texte n'est pas la caricature que certains voudraient en faire. Ainsi, des progrès considérables sont apportés pour renforcer notre droit d'asile.

Je citerai trois mesures en ce sens, déjà rappelées hier par Mme la rapporteure.

L'article 1er prévoit la délivrance d'un titre de séjour pluriannuel de quatre années dès la reconnaissance de la protection aux apatrides et aux bénéficiaires de la protection subsidiaire. L'article 3 ouvre le droit à la réunification familiale, en permettant l'entrée et le séjour en France des parents, frères et soeurs de mineurs déjà protégés. Nous avons également, au sein du même article, introduit la possibilité pour l'OFPRA de solliciter des examens médicaux pour garantir la protection des jeunes filles et des jeunes garçons contre les risques de mutilations sexuelles.

Si d'autres articles ont provoqué de longs débats, je tiens néanmoins à souligner le travail du groupe La République en marche auprès du Gouvernement, et tout particulièrement celui de la rapporteure, Élise Fajgeles, et du responsable du texte pour notre groupe, Florent Boudié, en vue de trouver un accord concernant la durée de la rétention administrative. Celle-ci passera de quarante-cinq à quatre-vingt-dix jours. Rappelons que cette durée reste bien en deçà des durées maximales prévues dans les grandes démocraties européennes.

Un amendement de Mme la rapporteure tendra à prendre en compte la situation de vulnérabilité de l'étranger avant qu'une décision de placement en rétention administrative soit envisagée.

S'agissant de la réduction du délai de recours devant la CNDA, il s'agit non pas de nier l'exercice du droit de recours, mais bien de ne pas entretenir de faux espoirs pendant de longs mois. Aujourd'hui, un requérant devant la CNDA a 82 % de chances de voir sa demande rejetée.

Le texte s'est aussi doté d'un volet entier consacré à une meilleure intégration des étrangers en situation régulière, en élargissant le champ du « passeport talent », en créant de nouvelles cartes de séjour pour les étudiants ou en accompagnant dans leur demande d'asile les mineurs isolés qui poursuivent un contrat d'apprentissage. Ce volet consacré à l'intégration a été enrichi par le rapport de notre collègue Aurélien Taché, qui propose un amendement, soutenu par le groupe La République en marche, tendant à permettre aux demandeurs d'asile de travailler six mois après le dépôt de leur demande.

Si nous ne menons pas ce travail indispensable de révision de nos procédures d'instruction des demandes d'asile, nous renforcerons la situation inacceptable que nous connaissons : entre 300 000 et 400 000 personnes sans papiers résident dans notre pays. Cette situation est inacceptable pour nos concitoyens mais elle l'est tout autant pour ces étrangers, ces familles dont les conditions de vie sont précaires et douloureuses.

C'est pour toutes ces raisons que le texte que nous sommes amenés à discuter et à voter cette semaine ne signe pas, comme on a pu l'entendre, l'arrêt de mort du droit d'asile, mais au contraire le protège dans un contexte mondial des migrations extrêmement préoccupant.

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