Intervention de Laurent Saint-Martin

Réunion du jeudi 29 mars 2018 à 9h35
Groupe de travail sur les moyens de contrôle et d'évaluation du parlement

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurent Saint-Martin, vice-président de la commission des finances :

Je suis obligé d'apporter un bémol à cette dernière phrase : s'agissant de sérieux et d'économies budgétaires – nous avons eu cette discussion dans le cadre du groupe de travail à la commission des finances –, il faut respecter les opinions de tous les groupes politiques ; il convient de ne pas en faire une obligation systématique dans l'exercice de l'évaluation, par respect pour le pluralisme politique.

M. Larrivé a signalé à juste titre que la qualité du travail qu'effectuent les administrateurs de l'Assemblée tient en partie à leur indépendance à l'égard du pouvoir exécutif. Il faut l'avoir à l'esprit avant de décider ou non d'internaliser l'unité de chiffrage, qui est par ailleurs une excellente idée. Reprenons l'exemple récent et concret de la taxe sur les dividendes : avait été adopté un amendement gouvernemental mal calibré, mal chiffré et mal formulé sur le plan juridique – et chacun connaît la suite. La majorité actuelle, avec les outils dont elle dispose, l'aurait adopté de la même manière, car nous n'avons pas de pouvoirs supplémentaires par rapport à nos collègues de la majorité précédente. Que se serait-il passé si nous avions pu nous appuyer sur des économistes spécialisés de l'administration ou d'ailleurs ? Ce sujet étant largement abordé dans l'ensemble de la sphère économique, le recours à des économistes extérieurs, même excellents, aurait peut-être présenté un risque de porosité. Au contraire, des administrateurs de l'Assemblée auraient permis de reprendre la réflexion depuis l'origine sur la viabilité juridique et financière de la taxe sur les dividendes, et sur l'absence de risques à l'égard de l'Union européenne et du Conseil constitutionnel. La réflexion sur l'indépendance totale – pourvu que l'on estime que la séparation des pouvoirs est elle aussi totale – des administrateurs est très intéressante.

Concernant la documentation dont nous disposons, madame Beaudouin-Hubière, la priorité serait de la rassembler, car elle est éparpillée, et de déterminer comment l'utiliser. C'est la base de l'évaluation : utiliser correctement les données existantes.

Quant à la Cour des comptes, le problème est réel : aujourd'hui, un responsable de programme agit en fonction de la manière dont il pense que la Cour des comptes le jugera. En dépit du professionnalisme de la Cour, cela signifie que nous n'effectuons pas notre travail d'évaluation. Nous ne sommes pas des contrôleurs et des magistrats de la Cour des comptes ; nous portons un regard différent sur l'efficience de l'évaluation des politiques publiques et de l'utilisation des derniers publics ; ce n'est pas la même chose. La Cour des comptes a naturellement occupé le vide laissé depuis longtemps par le Parlement. Il nous appartient de reprendre cette place, en toute légitimité, sans nous livrer à une quelconque guerre de chapelles.

Enfin, monsieur le rapporteur, le contrôle budgétaire de l'année n-1 et l'évaluation ex ante de l'année n+1 obligent constamment à contrôler l'exécution de l'année n : nous ne disposons certes pas des données chiffrées pour contrôler l'exécution du budget en cours de la même manière que celle de l'année précédente, étant donné le mode de remontée des données à la direction du budget, mais nous évaluons tout de même le budget de l'année en cours. Si nous constituons ces fameuses commissions d'évaluation des politiques publiques, je demanderai par exemple, en tant que rapporteur spécial, au ministre Darmanin de m'expliquer l'utilisation des crédits pour 2017 et les éventuels mouvements significatifs qui se seraient produits au premier semestre 2018. Nous examinerons donc forcément l'année n lors de cet exercice.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.