Intervention de Julien Dive

Séance en hémicycle du jeudi 17 mai 2018 à 9h30
Engagement associatif — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJulien Dive :

Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la rapporteure, chers collègues, à l'heure où la mondialisation fracture les territoires et dans un contexte d'individualisme grandissant, le secteur associatif demeure un acteur majeur dans la création du lien social. Il permet notamment à un jeune de trouver un club de sport ou culturel, à une personne en situation de handicap et à sa famille d'être soutenues dans leurs démarches, à un senior d'avoir accès une formation aux outils de communication modernes ou encore de venir en secours à une personne en grande détresse sociale.

Quand les services publics sont absents, notamment en milieu périurbain ou dans les communes rurales, les associations, elles, sont toujours là. Les associations, leurs bénévoles, incarnent de la plus belle des manières la solidarité nationale. Donner sans rien attendre en retour, c'est là tout l'esprit de l'engagement associatif.

En disant ces mots, j'ai envie de les incarner par des noms : je pense à Dominique Hannier – « Dynamite », c'est son surnom dans mon village – , super-bénévole, toujours prêt à donner un coup de main pour le barbecue le jour du banquet du 14 juillet ou encore à préparer la salle des fêtes pour les animations du Téléthon. Je pense à Sandrine Didier, présidente de l'association « HOP'Autisme 02 », qui mène un combat de tous les jours contre les administrations ou certains conservateurs pour faciliter la vie des parents et de leurs enfants atteints de troubles envahissants du développement. Des Dominique, des Sandrine, nous en connaissons des millions dans notre pays, dans nos circonscriptions, à la tête d'associations, chacun se risquant parfois face à des normes contraignantes.

Or ceux qui s'investissent peuvent se retrouver avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Vous le rappelez très bien avec ces dirigeants associatifs qui engagent leur responsabilité financière pour la structure dans laquelle ils s'impliquent. Les bénévoles prennent déjà sur leur temps personnel, sur leur énergie ; il n'est pas nécessaire de leur imposer une pression pénale et pécuniaire supplémentaire.

Cet aspect de l'engagement associatif, nous l'avons trop peu abordé au cours des derniers débats et pourtant il est essentiel si l'on veut comprendre la réticence de certains à s'engager. La proposition de loi que vous formulez afin de protéger davantage les dirigeants d'associations va certainement dans le bon sens, même si elle aurait pu être plus ambitieuse.

Le bénévolat souffre d'une double crise. Une crise financière, d'abord, puisque les subventions, qui représentent une part importante du budget des associations, ont été largement diminuées par des décisions telles que la suppression de la réserve parlementaire, que vous, députés MODEM, avez votée. Même si le Fonds pour le développement de la vie associative a été abondé de 25 millions d'euros, cela ne compense pas la perte pour les associations, surtout pour les plus petites d'entre elles, qui dépendent fortement de l'aide des pouvoirs publics.

On pourrait aussi y ajouter la suppression des contrats aidés, si utiles pour des structures comme les banques alimentaires qui, dans un département comme celui de l'Aisne, ont vu divisé par trois le nombre de ces personnes-ressources pour mener efficacement leurs missions.

Chers collègues, ne confondons surtout pas deux types d'associations : celles de village ou de quartier, exclusivement composées de bénévoles dévoués, et celles bien organisées comme des grosses entreprises, avec des dizaines de salariés formés pour monter des dossiers de subventions et de financement.

La deuxième crise, ensuite, est celle de l'engagement, que nous constatons chaque jour sur le terrain. Afin de faire face à celle-ci, vous proposez de présenter le monde associatif aux élèves. Bonne idée, mais trop peu aboutie, car le module théorique tel que vous le présentez reste flou : vous n'en détaillez ni les modalités ni la mise en oeuvre.

Ne serait-il pas plus intéressant d'organiser des journées d'immersion dans le monde associatif plutôt que d'en parler dans une salle de classe ? C'est en se confrontant à la réalité des choses que l'on prend conscience des problématiques qui se posent aujourd'hui. L'engagement devenant de plus en plus ponctuel, la présence des élèves sur le terrain serait alors plus susceptible de les toucher et de faire naître chez eux des vocations de long terme.

Au-delà de l'information au grand public que vous proposez, il y a une réflexion à mener sur la faisabilité de l'engagement associatif. Pour les jeunes, il suffit d'avoir l'envie d'agir et de faire preuve d'un peu d'organisation. Mais une fois actifs, cela se complique. Il ne faut pas se leurrer, entre l'activité professionnelle, la vie de famille et les diverses activités, l'engagement associatif, tel qu'il fonctionne aujourd'hui, peine à séduire. Afin de faciliter l'engagement des actifs, ce sont les horaires de travail des salariés qu'il conviendrait d'aménager, avec l'accord de leur employeur et dans le respect du temps de travail.

Une proposition de loi que j'avais présentée lors de la précédente législature prévoyait d'accorder un statut aux bénévoles associatifs actifs, ce qui leur aurait ouvert des droits à la retraite grâce à l'acquisition de trimestres supplémentaires. Cette mesure ne remettait pas en cause le caractère non lucratif de l'engagement associatif, mais permettait de reconnaître l'intérêt public du travail des bénévoles. De fait, ils remplacent les services publics dans de nombreux domaines et notamment dans celui du handicap. Faire un effort pour les bénévoles qui donnent de leur temps serait ainsi un moyen de faire face au manque d'engagement.

En tant que co-président, aux côtés de Bertrand Sorre, du groupe d'études sur la vie associative et le bénévolat, je reconnais les avancées de cette proposition de loi et voterai évidemment ce texte. Il n'en reste pas moins que le tissu associatif français mérite mieux que de petits ajustements, qui ne permettront pas de faire face à la crise du bénévolat.

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