Intervention de Jean-Baptiste Moreau

Séance en hémicycle du vendredi 25 mai 2018 à 15h00
Équilibre dans le secteur agricole et alimentaire — Après l'article 10 ter

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Baptiste Moreau, rapporteur de la commission des affaires économiques :

Je tâcherai de fournir des explications aussi complètes que possible. Le regroupement des centrales d'achat vise un objectif légitime, celui de conserver un positionnement avantageux et compétitif sur le marché aval, et peut avoir des effets bénéfiques pour le consommateur. Néanmoins, il peut aussi être porteur de risques concurrentiels qu'il peut être difficile d'apprécier lors de la conclusion des accords.

Dans son avis du 31 mars 2015 sur le rapprochement des centrales d'achat et de référencement dans le secteur de la grande distribution, l'Autorité de la concurrence a dressé un diagnostic des risques concurrentiels découlant de tels rapprochements. Sur le marché aval de la distribution, elle a identifié des risques de collusion induits par l'échange d'informations sensibles et la symétrie des coûts, ainsi que des risques d'éviction de certains distributeurs.

S'agissant du marché amont de l'approvisionnement, l'Autorité note que la puissance d'achat renforcée des distributeurs pourrait, en raison de la diminution des prix d'achat, fragiliser certains fournisseurs, les inciter à réduire la qualité ou à revoir leur capacité à investir, voire à les évincer. Le renforcement de la puissance d'achat des distributeurs induite par les rapprochements qui font l'objet de l'avis emporte également un risque d'accroissement du déséquilibre entre distributeurs et fournisseurs.

Le législateur a donc souhaité renforcer le contrôle de la mise en place des rapprochements de centrale d'achat et a instauré à l'article L. 462-10 du code de commerce une obligation de notification préalable à l'Autorité de certains accords de rapprochement ou de référencement.

Néanmoins, ce dispositif semble insuffisant au regard de l'ampleur et de l'accélération des rapprochements constatées au cours des dernières années, qui posent de façon plus aiguë encore la question de leurs effets sur le marché et des impacts concurrentiels qui en résultent, tant sur les marchés amont et aval que sur les filières industrielles et agricoles ayant des relations commerciales nouées avec les centrales d'achat concernées.

Face à ces évolutions rapides, le droit de la concurrence semble insuffisamment doté d'outils permettant d'apprécier les conséquences de la mise en place de tels accords ainsi que leur impact concurrentiel au regard de la grille d'analyse fixée par l'avis du 15 mars 2015. Il est donc souhaitable de compléter le dispositif législatif en vigueur sous deux angles.

Il convient d'une part d'améliorer le dispositif d'information préalable de l'Autorité de la concurrence en prévoyant la fourniture, par les parties à l'accord, d'un dossier d'information approfondi dont la teneur sera précisée par arrêté du ministre de l'économie, et en allongeant le délai préalable de notification avant la mise en oeuvre de l'accord à quatre mois.

D'autre part, il convient de réaliser un bilan concurrentiel de mise en oeuvre des accords, selon un modèle qui sera précisé par arrêté du ministre de l'économie, dans le cadre d'une procédure contradictoire aboutissant à une décision de l'Autorité de la concurrence susceptible, le cas échéant, de donner lieu à des mesures prises à son initiative afin de corriger les effets anticoncurrentiels de l'accord. Ce bilan concurrentiel permettra de formuler des préconisations susceptibles d'aboutir, comme je l'indiquais tout à l'heure, à l'exclusion de certains produits du champ des accords, voire à la dissolution de ceux-ci.

Il s'agit d'un dispositif qui n'existait pas jusqu'à présent. L'amendement fait l'objet de plusieurs sous-amendements, signés pour la plupart par M. Charles de Courson et plusieurs membres du groupe UDI, Agir et indépendants. J'en accepterai certains. Avec cet amendement, nous faisons le maximum de ce que permet le droit européen, en prévoyant la mise en place d'un véritable bilan concurrentiel permettant de mesurer l'effet des accords susmentionnés.

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