Intervention de Françoise Nyssen

Réunion du mardi 22 mai 2018 à 16h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Françoise Nyssen, Ministre de la Culture :

Aurore Bergé, vous m'interrogez sur l'articulation de ces dispositions avec le calendrier européen. La responsabilisation des plateformes est au coeur des discussions européennes, tant en matière de lutte contre les propos haineux ou le piratage – thématiques que j'ai relancées récemment – que dans le cadre de la directive SMA. Celle-ci devra être transposée dans la loi le plus vite possible.

Vous évoquez des mécanismes de censure privée : nous avons évalué les différents mécanismes, en discussion ou déjà votés comme en Allemagne, et ne sommes pas favorables à ce système. Un dispositif législatif nous semble préférable, avec un devoir de coopération plus étayé des plateformes lorsque les contenus seront signalés.

Madame Obono, Mme Naïma Moutchou pourra vous répondre sur la définition des fausses informations, sujet sur lequel elle a plus particulièrement travaillé. Il y a urgence à agir car les rendez-vous électoraux se rapprochent et vous connaissez tous les conséquences de la diffusion virale et massive de fausses nouvelles. Pour autant, nous nous laissons le temps de la réflexion et de la discussion pour aboutir au meilleur résultat possible.

Madame Forteza, la transparence des algorithmes est un sujet majeur. Le devoir de coopération inclut cette question. Comment faire en sorte que les algorithmes mettent en avant les informations labellisées et étayées, et que celles qui font l'objet de signalements soient sous-référencées ?

À cet égard, les exigences ont été récemment renforcées par le règlement européen du 27 avril 2016 sur la protection des données à caractère personnel (RGDP) et la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique. Cette dernière a confié à la Commission nationale informatique et libertés (CNIL) une réflexion sur l'éthique des algorithmes. L'évaluation de la loi du 7 octobre 2016 pourrait être l'occasion de faire un bilan de son application et de proposer, si besoin, des évolutions législatives. Le débat doit également continuer au niveau européen, le sujet constituant une préoccupation pour l'ensemble des États membres.

Monsieur Reiss, il n'y a pas de vérité officielle, ni de ministère de la vérité. Ce n'est pas au Gouvernement de s'ériger en arbitre du vrai et du faux. La proposition de loi renforce simplement les capacités d'action du CSA en matière de conventionnement et d'arrêt de diffusion de médias audiovisuels étrangers qui chercheraient à déstabiliser nos institutions. Sur Internet, seul le juge judiciaire intervient. Les deux autorités compétentes sont donc parfaitement indépendantes de l'exécutif et sont d'ailleurs déjà chargées de veiller à l'équilibre entre liberté d'expression et abus. Constitutionnellement, le juge judiciaire a toujours été le garant des libertés individuelles. Nous souhaitons, par ailleurs, améliorer l'information des citoyens et des médias en renforçant la transparence en période électorale.

La coopération avec les gouvernements étrangers est un enjeu diplomatique, que j'aborde régulièrement avec mon collègue Jean-Yves Le Drian – ce sera le cas après-demain en Russie. En outre, j'évoque régulièrement cette question au niveau européen, notamment avec Mme Mariya Gabriel, commissaire à l'économie et à la société numérique, et avec les autres ministres de la culture, soit en conseil des ministres européens de la culture, soit à l'occasion de moments plus informels que j'ai organisés – ainsi par exemple lors du festival Séries Mania à Lille.

Monsieur Attal, bien évidemment la coopération avec le CLEMI est centrale. La transformation de l'audiovisuel public à l'heure du numérique est essentielle et l'information – la bonne information – fondamentale pour lutter contre les fausses informations. Certes, l'audiovisuel public doit toucher un public de jeunes, promouvoir la culture et soutenir la création, unir, mais il doit surtout bien informer. La coopération entre les différentes sociétés de l'audiovisuel leur permettra de proposer ensemble une plateforme unique et numérique de décryptage de l'information. Actuellement, chacune d'elles développe des dispositifs extrêmement intéressants et met, par exemple, des journalistes à disposition pour contribuer à la formation. Mais ce travail était réalisé en ordre dispersé.

Nous avons bien entendu informé le ministère de l'éducation nationale. J'ai d'ailleurs participé avec Jean-Michel Blanquer au lancement de la Semaine de la presse à l'école. Une semaine par an, c'est clairement insuffisant… L'éducation aux médias doit être permanente. La meilleure façon de lutter contre les fausses nouvelles, c'est de donner la possibilité aux jeunes citoyens de développer leur esprit critique, de leur apprendre à décrypter une image, tout au long de leur formation.

Quand elles sont isolées, ces initiatives perdent en efficacité. La future plateforme, dont la construction a déjà bien avancé, s'intitulera sans doute Franceinfo, et nous sera probablement présentée dès la semaine prochaine.

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