Intervention de Éric Coquerel

Séance en hémicycle du dimanche 3 juin 2018 à 15h00
Évolution du logement de l'aménagement et du numérique — Article 29

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Coquerel :

Chaque année depuis plusieurs années maintenant, la Fondation Abbé Pierre distribue des cartons rouges en matière de politique du logement, notamment sur les questions du mal-logement et du sans-logement. En France, environ 2 millions de ménages sont dans l'attente d'un logement social. C'est là, certes, le résultat du cumul de politiques défaillantes menées par plusieurs gouvernements, qui ont divisé par six les subsides publics distribués au logement social depuis 1999, en même temps que se dérégulait le marché privé.

Il y a quelques mois, vous avez décidé de diminuer les APL. Afin que cette mesure soit la moins douloureuse possible pour les plus défavorisés de nos concitoyens, vous avez décidé que les bailleurs sociaux prendraient à leur charge l'économie de 1,5 milliard d'euros ainsi réalisée par l'État. Pour que ces bailleurs se « refassent » financièrement, vous les avez autorisés à vendre en bloc – en quelque sorte à la découpe – une part de leurs logements sociaux, y compris ceux qui font l'objet d'un PLS, dont vous autorisez la vente directe à des entreprises de droit privé. Ce faisant, vous changez, à terme, la nature des bailleurs sociaux. Vous leur imposez pour seule optique la rentabilité et non plus seulement l'équilibre dans la gestion de leur parc social. Ainsi, ils ne pourront faire du logement social que s'ils ont vendu, par ailleurs, suffisamment d'autres logements de ce type.

Cette pente, très dangereuse, peut fragiliser définitivement la politique de logement social en France. Au cours de nos débats, vous n'avez pas accepté d'encadrer une telle aberration, refusant les limites que nous vous avons proposées, avec d'autres groupes, pour les villes qui ne respectent pas la loi SRU. Vous n'avez pas accepté de poser, au moins, des limites pour les villes dites « carencées », pour lesquelles nous proposions d'interdire ces ventes en bloc de logements sociaux. Vous n'avez non plus accepté de garantir un prix social à un nouvel acheteur qui, comme le texte le dit lui-même, est au départ le locataire du logement.

Avec l'article 29, vous affaiblissez donc dangereusement le logement social en France. Les inégalités risquent également de s'accroître entre les villes qui ne respectent pas la loi SRU et les autres. Puisque vous voulez souvent faire adopter des lois avec bonne conscience, l'expression va sûrement vous faire hurler mais, avec cet article, vous méritez plus que jamais l'appellation de Gouvernement et de majorité des très riches.

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