Intervention de Mathilde Panot

Séance en hémicycle du mardi 1er août 2017 à 15h00
Renforcement du dialogue social — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMathilde Panot :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, au nom du groupe La France insoumise, je demande ici le rejet des ordonnances sur le code du travail, et ce pour plusieurs raisons que je veux vous exposer car nous n'acceptons pas cette situation.

Premièrement, ce projet ne répond pas aux urgences actuelles du pays. Madame la ministre, la réalité sociale de notre pays semble vous avoir échappé : 9 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté, dont 1 million de travailleurs pauvres, alors qu'il y a 39 milliardaires dont la fortune s'est, en un an, accrue de 21 % !

La répartition des richesses est absurde : il faut donc l'améliorer. La réalité sociale, c'est que dix points de PIB ont été transférés depuis 1982 des salaires aux profits financiers. Ce transfert des salaires vers la finance ne fonctionne pas : il étouffe l'économie réelle, prive les PME de débouchés et nous oblige à éponger des crises récurrentes avec de l'argent public.

II y a une urgence à rendre aux salariés et aux entreprises qui investissent une proportion digne de ce qu'ils produisent et qui est accaparée par les profits financiers.

La réalité sociale, c'est que 6 millions de personnes sont inscrites à Pôle emploi, alors que seules 21 000 offres d'emploi n'ont pas trouvé preneur, souvent parce qu'elles concernent des emplois pénibles, qui sont proposés dans des conditions indignes : il y aurait 285 chômeurs par offre ! Pourtant, depuis juin 2016, on a radié 664 000 personnes, soit trente fois plus qu'il n'y a d'emplois non-pourvus en circulation : c'est absurde, et cela frappe surtout les quartiers populaires.

II y a une pénurie d'emplois en France : il faut donc relancer l'activité. Chaque année, le chômage – là encore, c'est la réalité sociale – tue directement 14 000 personnes, soit quatre fois plus que la route.

Troubles cardiovasculaires, dépressions, manque de sommeil, suicides, accidents de la route : les chômeurs ont une mortalité trois fois supérieure à celle des actifs. Derrière la pénurie d'emplois, il y a des vies en danger.

La réalité sociale, c'est aussi que le travail, tel qu'il se pratique aujourd'hui, tue : 565 salariés meurent chaque année à leur poste de travail. Depuis les années 2000, le nombre de journées de travail perdues suite à un accident du travail est en hausse : on compte 38 millions de journées annuelles gaspillées à cause de la violence quotidienne faite à des salariés.

Selon l'Institut de veille sanitaire, un quart des hommes et un tiers des femmes souffrent, dans notre pays, de détresse psychologique liée à leur travail : il faut mettre en place un plan d'urgence contre la souffrance au travail. Non, l'urgence n'est pas de faciliter le travail de nuit !

Et parce qu'il faut mettre des visages sur des nombres, je veux vous parler d'Emeline qui a subi la précarité qui blesse et mutile. Après avoir été embauchée à La Poste en contrat à durée déterminée – contrat qui a été renouvelé plus que ce que permet la légalité – , cette jeune femme a fait, sur son lieu de travail, un accident vasculaire cérébral. Alors qu'elle se sentait mal, c'est tout juste si sa hiérarchie ne l'a pas traitée de menteuse : « Finis ton travail, on appellera les pompiers après ».

Et comme on ne l'a pas prise en charge assez vite, elle a terminé avec un handicap à 25 ans. Pire : à la suite de son AVC, dont elle gardera des séquelles à vie, La Poste lui a refusé un contrat à durée indéterminé et le facteur qui l'a secourue et qui a appelé les pompiers a été mis à pied et n'a pas travaillé pendant plus de huit mois !

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