Intervention de Pierre Dharréville

Séance en hémicycle du mardi 1er août 2017 à 15h00
Renforcement du dialogue social — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Dharréville :

En guise de révolution politique, voici un projet qui reprend et aggrave les logiques du monde d'avant. Vous avez choisi de jouer la partie pied au plancher, cherchant à profiter de la torpeur de l'été, surfant sur la popularité présidentielle avant son érosion, faisant du Parlement une chambre d'enregistrement.

Nous en savons trop peu, mais assez pour pouvoir dire que c'est à une loi de démolition sociale que vous allez donner votre nom, madame la ministre. Quels nouveaux droits pour les salariés ? Quelles garanties collectives ? Quels progrès sociaux ?

Votre loi, que tous ici appellent « loi travail », se présente en trois temps. Premièrement, vous allez faire du code du travail une passoire, donnant un rôle normatif à la branche et à l'entreprise. Deuxièmement, vous allez fusionner les institutions représentatives du personnel et généraliser le recours au référendum d'entreprise pour contourner les organisations syndicales. Troisièmement, vous allez réduire le périmètre d'appréciation des licenciements économiques, relever les seuils déclenchant une procédure de plan de sauvegarde de l'emploi, étendre l'usage de CDI « Canada Dry » qui ne seront en définitive que des contrats précaires. Et tant d'autres choses que nous ne savons pas encore…

L'objet du dialogue social que vous annoncez sera donc principalement la casse économique et la régression sociale. La sécurité, vous la promettez aux employeurs pour licencier et précariser, et vous la retirez aux salariés. Qui en profitera ? Pas les petites entreprises !

Madame la ministre, nous vous avons demandé à de nombreuses reprises si la financiarisation de l'économie n'était pas la principale source des problèmes, s'il ne convenait pas de s'y attaquer, et nous avons formulé des propositions en ce sens. Vous avez regardé ailleurs. Sans préjuger de vos intentions personnelles, ce que nous avons appris ces derniers jours est un témoignage ordinaire de la possibilité de faire du profit à partir de destructions d'emplois. Nous avions proposé de l'interdire. Cela montre également combien les richesses créées dans l'entreprise sont mal utilisées et inégalement réparties. Le niveau de rémunération des actionnaires des grandes sociétés est indécent et, pour légal qu'il soit, relève de la spoliation. C'est aussi cela qui révolte, mes chères et chers collègues ; or c'est cela que vous allez hélas encourager.

Nous avons passé la semaine à parler de confiance dans la vie publique ; mais la République est abîmée, abîmée par le pouvoir de l'argent qui cherche à s'insinuer partout, par le renoncement à honorer sa promesse égalitaire, laissant prospérer les privilèges de quelques-uns. La fortune des dix personnes les plus riches de notre pays a fait un bond de 35 % en un an !

Voilà pourquoi votre loi tout entière et vos explications sont disqualifiées d'avance. Votre gouvernement est du côté des stock-options, qui sont les dommages et intérêts – mais pour quel préjudice ? – des actionnaires, des dommages et intérêts auxquels on ne touche pas : deux poids, deux mesures… Vous l'avez dit vous-même en commission : « Ça commence par les actionnaires qui doivent être pris en compte, qui ont mis leur argent, il leur faut un retour… » Ce système est destructeur : il y a là de nouveaux cadeaux sans contrepartie.

Nous appelons à faire grandir ce débat public dont vous n'avez pas voulu, pour vous obliger à prendre en considération cette réalité sociale que vous ne voulez pas voir. Parce que nous refusons que vous fassiez du monde du travail du « grain à moudre » pour les vendanges du CAC 40,

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.