Intervention de Emmanuelle Ménard

Séance en hémicycle du jeudi 7 juin 2018 à 21h30
Lutte contre la manipulation de l'information — Article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEmmanuelle Ménard :

On dit que la clé de voûte est la pièce maîtresse d'une arche, celle sans laquelle tout se casse la figure. C'est la pièce dont on doit se soucier le plus. Celle de votre proposition de loi semble être la définition que vous donnez de la fausse information. Il ne devrait donc y avoir aucune imprécision dans cette définition. Or, en la lisant avec attention, on sait encore moins ce que vous entendez par « fausse information ». Vous prétendez l'expliquer en deux lignes, mais ce concept fourre-tout n'a que le sens qu'on lui donne. Est-ce une rumeur ? Une opération de déstabilisation durant l'élection ? Nul ne le sait. La porte est ouverte à de multiples interprétations, et cette loi ne pourrait être appliquée sans une grande part d'arbitraire.

D'ailleurs, comment l'appliquer ? Je souhaite bien du courage au juge qui devra vérifier toutes les fake news ! On le rend responsable de dire la vérité, et en urgence. Trop d'incertitudes, trop d'interprétations possibles, bref, c'est le flou artistique. On aurait certainement pu en faire l'économie, car, vous le savez, il existe déjà près de 400 textes qui encadrent la liberté d'expression et, depuis 1850, un délit de fausse nouvelle. Alors pourquoi persévérer et vouloir toujours plus de lois ? Vous qui vous targuez de vouloir simplifier, vous ne faites que créer de la confusion.

Enfin, je crois sincèrement que voter cette loi, c'est inciter chacun à l'autocensure, et c'est ce qui est le plus grave. C'est mettre fin, de manière insidieuse, à la liberté d'expression, car à partir du moment où chacun d'entre nous délivre une information qui n'est ni vraisemblable ni démontrable rapidement, elle devient fausse. La liberté d'expression se meurt, mais vive la démocratie.

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