Intervention de Julien Denormandie

Séance en hémicycle du vendredi 8 juin 2018 à 15h00
Évolution du logement de l'aménagement et du numérique — Article 55

Julien Denormandie, secrétaire d'état auprès du ministre de la cohésion des territoires :

Je suis également défavorable à l'amendement no 2760 . Quant à l'amendement no 1100 , il a fait l'objet d'un grand débat. Je connais votre engagement sur le sujet, madame Riotton, ainsi que celui de toute la commission, et je veux saluer votre travail ; je vous proposerai pourtant de retirer l'amendement, et à défaut j'émettrai un avis défavorable.

En effet, la loi avait fixé des objectifs qui, comme Mme la rapporteure l'a expliqué tout à l'heure, avaient été jugés inatteignables. Le présent article module ces obligations en fixant la première échéance à 2030. La question est de savoir si, oui ou non, on crée une étape intermédiaire. Aujourd'hui, l'objectif est d'atteindre moins 40 % en 2030 ; par cet amendement, vous proposez d'introduire l'objectif intermédiaire de moins 15 % en 2025.

Pourquoi cela pose-t-il problème ? À la suite du débat en commission, on a retravaillé le dossier : dans un bâtiment tertiaire, on fait les travaux ou on ne le fait pas, mais pour atteindre 40 % de réduction, il ne suffit pas de réaliser de petits aménagements : il faut des travaux d'ampleur.

Tout à l'heure, j'ai donné un exemple personnel : j'ai participé à la mise en place de l'énergie au bois dans une scierie et ce travail a permis d'atteindre les objectifs d'un seul coup ; mais il m'aurait été impossible d'atteindre un objectif intermédiaire. Comme on dit en science, la courbe n'est pas linéaire : l'investissement fait immédiatement passer à un autre niveau.

Donc, créer une étape intermédiaire est impossible dans ce cas, à moins de considérer que l'étape intermédiaire est de faire atteindre l'objectif de 40 % à un certain pourcentage de bâtiments. Après avoir beaucoup travaillé sur la question, je suis persuadé qu'on ne peut pas fixer d'objectif intermédiaire en pourcentage des réductions. Cela peut même avoir un effet contre-productif : un chef d'entreprise ou un gestionnaire d'un bâtiment tertiaire qui se sera débrouillé pour atteindre l'objectif de moins 15 % en 2025 en changeant les fenêtres ou en faisant d'autres aménagements qui permettent de diminuer la consommation d'énergie, se verra réclamer, quatre ans après, de passer de 15 % à 40 % en 2030. Or pour y arriver, il sera obligé de vraiment revoir la structure du bâtiment, donc de faire un investissement massif, alors que quatre ans auparavant, il aura déjà tout changé. Cela peut être décourageant.

À mon sens, l'objectif doit rester à moins 40 % en 2030. Je pense – mais je m'en remets à votre travail de députés et suis convaincu que vous allez vraiment le faire – que la question fondamentale renvoie au contrôle, y compris parlementaire, de la dynamique de la progression vers la réalisation de cet engagement.

Il faut de la transparence en matière d'investissements réalisés et un bon pilotage des entités de l'État qui s'en occupent, tels que l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l'ADEME. On peut faire un parallèle avec les réhabilitations de logements privés : Jacques Mézard, Nicolas Hulot et moi-même avons fixé des objectifs à l'Agence nationale de l'habitat – l'ANAH – , et toutes les deux semaines nous rencontrons la directrice de l'agence, qui nous dit où elle en est, en pourcentage, dans la progression vers cet objectif sur l'année. C'est d'un tel type de pilotage que nous avons besoin.

Je vous propose donc, tout en vous remerciant pour tout le travail réalisé, de retirer l'amendement. Sinon, j'émettrai un avis défavorable, pour les raisons que je viens d'exposer.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.