Intervention de Huguette Bello

Séance en hémicycle du lundi 11 juin 2018 à 21h30
Liberté de choisir son avenir professionnel — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHuguette Bello :

Il est souvent vécu comme un choix par défaut. Je doute fort, en dépit des campagnes de communication, qu'un retournement général de la situation se fasse jour. Même si elles ne maîtrisent pas tous les codes du système éducatif, les familles savent, de façon presque intuitive, ce qui est bon pour leurs enfants. Ce n'est pas l'imbroglio créé de toutes pièces autour du service public de l'orientation, dont le rôle primordial est souligné par tous, qui les rassurera !

Chers collègues, je n'avais jamais envisagé que la formation puisse un jour, en France, s'inspirer de ce dogme de la concurrence pure et parfaite, de cette lourde hypothèse d'école dont on mesure, à chaque instant, les dégâts ! La monétisation du compte personnel de formation, qui fait d'ailleurs l'unanimité contre elle, restera comme le symbole de cette évolution. L'individualisation des parcours qu'elle promeut n'est d'ailleurs pas sans rappeler cette lubie managériale des années quatre-vingt par laquelle on voulait faire croire à chaque salarié qu'il constituait une petite entreprise personnelle – une PEP – d'où il tirerait son bénéfice individuel net – son BIN. On imagine sans mal la créativité de ces managers si internet et ses applications avaient existé !

Cette logique ultralibérale conduit d'ailleurs à des paradoxes. Alors que l'on ressasse à l'envi l'obligation d'être fin prêt pour la mobilité professionnelle, les moyens pour la reconversion sont revus à la baisse. Le congé individuel de formation, qui remonte à 1971, laissera la place à un compte personnel de formation – CPF – de transition professionnelle moins ambitieux et aux contours encore fluctuants.

La formation professionnelle est l'un de ces lieux privilégiés où les destins individuels rencontrent le projet collectif. Elle interdit les stratégies arbitraires et mobilise toutes les dimensions de l'humain. En 1971 comme en 1982, les lois Delors et Auroux sur la formation professionnelle ont été votées dans des contextes de modernisation économique et sociale. Voulant répondre, elles aussi, à d'importants défis, elles ont placé la personne et le travailleur au centre de leurs décisions. Beaucoup d'intérêts, nous le savons, les ont combattues. Votre loi, madame la ministre, en enterre l'esprit.

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