Intervention de Daniel Labaronne

Réunion du jeudi 31 mai 2018 à 15h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Labaronne, rapporteur spécial :

Notre présence aujourd'hui, dans le cadre d'un nouvel exercice – le « Printemps de l'évaluation » – illustre cette volonté. Pour ce faire, comme souligné dans mon rapport dans le cadre du PLF 2018, la Cour des comptes a une mission d'assistance du Parlement. Il nous appartient, en tant que parlementaires, de nous saisir davantage des ressources en expertise que procurent ses travaux.

Concernant le HCFP, les ressources du programme 340 représentent moins de 1 % du budget total de la mission, soit 424 000 euros en crédits alloués et 362 000 euros en crédits consommés. À 85,8 %, ce taux de consommation est le plus bas de la mission. Je ne peux ici que réitérer les interrogations de mon prédécesseur et éminent collègue Philippe Vigier, et les miennes à l'automne, quant à l'utilité du maintien de ce programme spécifique. C'est un vieux combat !

Concernant le Conseil d'État, le programme 165 constitue le support budgétaire des ressources allouées au Conseil d'État, aux 8 cours administratives d'appel, aux 42 tribunaux administratifs, et à la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). Cette dernière est une juridiction administrative dont la mission consiste à statuer sur les recours formés par les demandeurs d'asile à l'encontre des décisions rendues par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA). En 2017, la Cour disposait de 420 agents permanents, dont 17 magistrats et 191 rapporteurs. Les ressources du programme 165 représentent environ 61 % du budget total de la mission, soit 410 millions d'euros en crédits alloués et 388 millions en crédits consommés. Le programme 165 disposait en 2017 de moyens financiers sensiblement renforcés. Je note que le montant des crédits ouverts au titre de l'exercice 2017 augmente de 6,7 % en AE et de 5,8 % en CP. Je constate que ces chiffres illustrent une gestion qui apparaît rigoureuse des crédits et des emplois, et une bonne maîtrise de la dépense.

Les indicateurs de performance qui reposent aujourd'hui sur quatre principaux objectifs me semblent pertinents. Je voudrais attirer votre attention sur ce point. En particulier, je souhaite souligner l'évolution récente du délai moyen prévisible de jugement des affaires, qui était retenu, vers un délai moyen constaté. Cette démarche de performance est au coeur de la politique budgétaire du programme et il faut ici la saluer. Toutefois, des écarts avec les cibles de performance illustrent l'élévation croissante de la charge du contentieux, ce qui m'amène à poser la question de la capacité du programme à respecter ses objectifs de performance à moyen terme. Le Conseil d'État et les cours administratives d'appel voient par exemple le pourcentage d'affaires en stock depuis plus de deux ans augmenter. Le taux de consommation des crédits de paiement, quant à lui, atteint 94,7 %. Ce taux nettement plus élevé en 2017 s'explique par la croissance des dépenses de personnels. L'effort fourni visait pour l'essentiel à renforcer de 40 postes les effectifs de la CNDA, afin de permettre à la Cour de répondre aux nouvelles exigences que comporte la réforme du droit d'asile. Pour le reste du programme, la Cour des comptes souligne que le redressement de la capacité de jugement des juridictions administratives demeure fragile au regard de l'augmentation continue du contentieux, et estime qu'une augmentation des moyens humains s'avère nécessaire. En effet, la hausse continue du contentieux atteint un rythme annuel de 6 % pour les juridictions administratives suite à la montée en puissance des contentieux de masse, notamment les contentieux sociaux. Cela m'amène à ma deuxième question. Monsieur le ministre, pensez-vous que les hypothèses de progression des ressources inscrites dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 soient bien calibrées ?

Je souhaite également souligner que la CNDA, qui sera mon thème d'évaluation, a enregistré une augmentation de 34 % des recours qui lui étaient adressés en 2017. Cet alourdissement de sa charge de travail résulte de l'augmentation du nombre des décisions rendues par l'OFPRA dans le traitement des demandes de droit d'asile. Ma troisième question est donc la suivante. Pourriez-vous préciser les hypothèses formulées quant à l'activité de la Cour ayant déterminé l'octroi de personnels supplémentaires dans le cadre du programme 165 ?

Nous connaissons les efforts que le Gouvernement entreprend pour rendre le budget plus sincère. Pour la mission budgétaire Immigration, Asile et Intégration, les prévisions de dépenses ont été effectuées pour 2018 « en tenant compte d'une hausse de la demande d'asile estimée à 10 % ». J'en viens à ma quatrième question. Quel regard portez-vous sur ces prévisions, dans un souci d'ajustement dans le cadre du PLF 2019 ?

J'ai également une cinquième question. Quel jugement peut-on porter sur la qualité des échanges d'informations entre les ministères des affaires étrangères, de l'intérieur et le responsable du programme 165 ? Vous apparaît-il nécessaire de formaliser une procédure permettant de mieux ajuster les moyens dévolus à la CNDA au regard de l'évolution probable du nombre de demande d'asile ?

Par ailleurs, d'après le rapport d'activité 2017 de la CNDA, le taux de dématérialisation des correspondances relatives aux affaires portées devant la Cour atteint seulement 38,5 % du total des pièces de procédure. Le rapport de 2018 sur la mission souligne « l'incomplétude et le délai des transmissions des décisions de l'OFPRA et de la CNDA ». Ma sixième question est donc la suivante. Quels gains d'efficience supplémentaires la dématérialisation des procédures peut-elle encore apporter au fonctionnement de la CNDA ?

Même si, en 2017, la CNDA est parvenue à rajeunir son stock d'affaires, nous savons qu'en 2018 de nouveaux mouvements sociaux se sont déclenchés, faisant s'accumuler un stock d'affaires important. Les dispositions du projet de loi pour une immigration maîtrisée et un droit d'asile effectif, notamment le raccourcissement des recours, ne manqueraient pas d'affecter les besoins en ressources de la CNDA. Les prévisions pour 2019 apparaissent donc complexes mais primordiales pour la bonne mise en oeuvre de la réforme que nous avons entreprise, conformément aux engagements du Président de la République.

Enfin, concernant le CESE, les ressources du programme 126 représentent environ 6 % du budget total de la mission. Le montant des crédits consommés au terme de 2017 progresse de 1,75 %, soit un rythme inférieur à celui constaté en 2016. Le taux de consommation atteint 100 % des crédits alloués. L'article 14 du projet de loi constitutionnelle prévoit, comme annoncé par le Président de la République, une réforme de la transformation du CESE en Chambre de la société civile et une diminution de ses membres. Ma dernière question sera donc celle-là. Au regard de cette réforme à venir, avez-vous des hypothèses sur le nouveau périmètre budgétaire dans le cadre du PLF 2019 ? Cette réforme est peut-être l'occasion de s'interroger sur la définition de nouveaux critères de performance en lien avec la budgétisation, afin de mieux rendre compte de l'esprit de responsabilité des instances publiques face aux résultats, tout en assurant une meilleure lisibilité par nos citoyens du travail effectué par cette nouvelle Chambre.

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