Intervention de Gérard Collomb

Réunion du mardi 5 juin 2018 à 21h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur :

La mission Sécurités suscite un grand nombre de questions, ce que je peux comprendre étant donné l'importance du sujet.

Pour ce qui est de la trajectoire des effectifs, comme chacun le sait, il a été supprimé environ 13 000 emplois dans les forces de l'ordre entre 2007 et 2012. Depuis 2013, et surtout depuis 2015, sous l'effet de différents plans, nous avons embauché 5 600 personnes dans la police et 3 200 dans la gendarmerie. Ces recrutements ont parfois dû se faire dans l'urgence, ce qui explique que l'on ait raccourci la durée des formations.

Nous avons l'ambition de créer 10 000 nouveaux emplois durant le quinquennat, dont 5 525 postes de policiers, 2 500 postes de gendarmes, 1 900 emplois dans les services de renseignement et 75 emplois dédiés à l'armement des pôles régionaux d'éloignement, au déminage et au personnel navigant de la sécurité civile.

Il a été dit qu'au cours des dernières années, les concours n'avaient pas toujours permis de pourvoir tous les postes offerts par la police nationale, ce qui est exact pour l'année 2016 et pour le début de 2017 – une année durant laquelle les problèmes de recrutement ont commencé à être réglés, ce qui fait que les postes non pourvus se sont limités à six postes de commissaire de police. Afin de remédier à la situation, nous avons ajusté en 2017 les seuils d'admissibilité au concours de gardien de la paix.

Pour assurer la qualité des recrutements effectués, nous devons faire en sorte d'avoir le plus grand nombre possible de candidats aux concours : pour cela, nous avons lancé il y a un mois une grande campagne de recrutement afin d'être en mesure d'assurer le remplacement des personnels qui vont partir en retraite prochainement – pour des raisons démographiques, ces départs vont être assez importants –, mais aussi de réaliser notre objectif de recruter 10 000 personnes. Aujourd'hui, nous disposons d'un vivier de 5 600 candidats admissibles au concours de gardien de la paix – pour 1 800 postes ouverts –, ce qui va nous permettre de restaurer la qualité de recrutement, qui avait pu diminuer au cours des dernières années.

Afin d'élargir le vivier des candidats, nous envisageons également de réformer le concours interne de gardien de la paix à l'horizon de septembre 2019, en procédant à une répartition des postes de gardiens de la paix entre deux concours internes – l'un réservé aux adjoints de sécurité (ADS), cadets de la République et gendarmes adjoints volontaires (GAV), l'autre ouvert à tous les fonctionnaires. Cette mesure répond à la nécessité actuelle de diversifier nos recrutements.

Comme vous l'avez dit, nous devons également adapter nos capacités de formation pour accompagner l'ensemble de ces recrutements. Je rappelle qu'en 2018, ce sont 7 184 élèves gardiens de la paix, ADS et cadets de la République qui vont être formés en vue d'entrer dans les effectifs de la police, ainsi que 10 500 futurs officiers de gendarmerie.

Les capacités de formation des gendarmes ont été augmentées, notamment grâce à l'ouverture d'une nouvelle école de gendarmerie à Dijon. Par ailleurs, un centre national de formation à la sécurité publique (CNFSP) a été créé en 2017 pour renforcer la capacité de formation continue des sous-officiers. Enfin, un travail spécifique porte sur le contenu et les modalités de la formation que nous sommes en train de réviser en profondeur.

Pour ce qui est de la police, nous réfléchissons également aux moyens de répondre aux besoins de formation. Entre 2018 et 2020, 30 millions d'euros seront consacrés à des projets immobiliers relatifs aux écoles de formation de la police. Par ailleurs, nous avons engagé une discussion avec le directeur général de la police nationale afin de revoir le cadencement de la formation initiale. Il s'agirait de mettre en place une séquence de formation initiale, suivie d'un stage en équipe sur le terrain, afin de permettre aux personnels d'appréhender la réalité ; ils repartiraient ensuite pour deux ou trois mois de formation complémentaire en école.

En ce qui concerne les investissements dans les équipements numériques, je rappelle que nous sommes en train de le réaliser à la fois pour la gendarmerie et la police. Pour la police nationale, 28 400 équipements – tablettes et smartphones – ont été commandés et livrés en 2017, et 22 000 terminaux NEOPOL supplémentaires seront déployés d'ici la fin 2019. Pour la gendarmerie, le plan d'équipement est encore plus avancé, puisque 57 000 tablettes et smartphones ont déjà été livrés, ce qui porte le nombre d'équipements disponibles à 67 000 et correspond quasiment à la fin du déploiement du programme NEOGEND. Les caméras-piétons sont également en cours de déploiement. Nous venons de passer un marché supplémentaire, portant sur la livraison de 10 400 caméras-piétons en 2018, qui vont venir s'ajouter aux 8 000 déjà en service.

J'en viens au problème des tâches indues, dont il convient de réduire le nombre. Nous y travaillons actuellement avec la garde des sceaux et, pour ce qui est de notre propre ministère, nous avons réduit les gardes statiques devant les préfectures ; les extractions judiciaires ont elles aussi été réduites, et nous avons signé, le 28 septembre dernier, une circulaire ne laissant que vingt extractions vicinales à la charge des forces de sécurité. Nous réfléchissons également, toujours avec la garde des sceaux, à une réforme de la procédure pénale devant permettre de réduire certaines tâches, notamment au moyen de la numérisation, grâce à la signature numérique et à la dématérialisation des procédures.

Les dépenses d'investissements immobiliers se sont élevées pour la police nationale à 84 millions d'euros de crédits de paiement en 2017 et à 83 millions d'euros pour la gendarmerie. Comme vous le savez, nous avons essayé de sincériser les budgets. La gendarmerie avait accumulé en matière immobilière une dette de 100 millions d'euros, que nous avons entrepris de résorber dans le cadre d'un plan pluriannuel – nous l'avons ainsi diminuée de 13 millions d'euros en 2017, et de la même somme en 2018. Il fallait bien, à un moment donné, s'attaquer à ce problème !

Nous avons lancé un certain nombre d'opérations immobilières d'envergure. Au-delà, nous avons souhaité décentraliser des crédits. Nous avons ainsi fait passer de 19 millions d'euros à 45 millions d'euros la somme des crédits mis à la disposition des préfets, des directeurs de la sécurité publique (DSP) et des commissaires de police, de manière à leur permettre de répondre aux besoins signalés dans leur département.

M. Giraud, j'ai voulu savoir quelles avaient été les impasses budgétaires de 2018, afin que nous repartions sur des bases sincères. Ce « resoclage » du budget devrait, je l'espère, nous éviter d'avoir à chercher des astuces en cours d'année pour atteindre les objectifs définis dans le cadre de la loi de finances, mais qui seraient insuffisamment dotés. Nous sommes en train de discuter avec M. Darmanin du budget de l'année prochaine, et je vous dirai, à l'occasion d'une prochaine audition, sur quelles bases nous avons décidé de reconstruire notre budget pour la police et la gendarmerie.

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