Intervention de Emmanuelle Ménard

Séance en hémicycle du jeudi 14 juin 2018 à 15h00
Liberté de choisir son avenir professionnel — Article 9

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEmmanuelle Ménard :

Le contrat d'apprentissage est un contrat particulier dont les modalités de rupture sont très différentes de celles qui peuvent régir les autres contrats. Ainsi, un apprenti ne peut utiliser les règles habituelles de démission, aucun employeur ne peut appliquer les règles du licenciement classique. L'abandon des relations contractuelles n'est facilité que lors de la période d'essai. Au-delà, la résiliation doit respecter certaines conditions, ce qui est normal, que ce soit l'employeur ou l'apprenti qui en a pris l'initiative.

Avec l'article 9, vous proposez de simplifier les modalités de rupture du contrat. Il faut agir avec précaution, car la rupture de contrat dans le cadre d'un apprentissage est toujours susceptible d'être extrêmement déséquilibrante pour l'apprenti dans son parcours.

Malheureusement, les jeunes qui s'engagent dans la voie de l'apprentissage le font encore trop souvent parce qu'ils ont échoué dans le système classique traditionnel. Or, rompre son contrat d'apprentissage peut maintenir cette personne dans ce sentiment d'échec et l'enfermer dans une spirale de l'échec.

Quelles sont les conséquences des ruptures de ces contrats d'apprentissage dans le parcours de formation des jeunes apprentis ? Comment faire pour que de telles ruptures ne conduisent pas à l'échec ?

Dans l'esprit du jeune, la rupture de son contrat n'est pas simplement une interruption du lien salarial. Il peut aussi signifier pour lui le risque de ne pas obtenir son diplôme, ce qui pourrait le déstabiliser et détruire sa confiance en lui, sentiment souvent aggravé par le jeune âge des apprentis.

Les chiffres parlent d'eux-mêmes : 28,1 % des apprentis ou des employeurs rompent les contrats. C'est pour les formations aux métiers les moins côtés ou à ceux pour lesquels les qualifications nécessaires sont les plus faibles que le taux de rupture est le plus élevé. Il atteint presque 50 % dans l'hôtellerie et la restauration.

Plus inquiétant : dans près de 80 % des cas, la rupture du contrat d'apprentissage entraîne un arrêt complet de l'apprentissage.

Pour cette raison, le dernier alinéa de votre article 9, qui dispose que, « en cas de rupture du contrat d'apprentissage en application de l'article L. 6225-18, le centre de formation dans lequel est inscrit l'apprenti prend les dispositions nécessaires pour lui permettre de suivre sa formation théorique pendant six mois et contribue à lui trouver un nouvel employeur susceptible de lui permettre d'achever son cycle de formation », est une excellente mesure. Cependant, il manque certainement à cet article certaines précisions que vous annoncez vouloir fixer par décret et sur lesquelles il serait nécessaire que nous soyons éclairés, en particulier pour ce qui est des conditions d'une possible démission.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.