Intervention de Delphine Gény-Stephann

Séance en hémicycle du jeudi 21 juin 2018 à 15h00
Renforcement des droits des consommateurs en matière de démarchage téléphonique — Présentation

Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'état auprès du ministre de l'économie et des finances :

Madame la présidente, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, les appels téléphoniques intempestifs et répétés constituent une nuisance pour nos concitoyens. Le Gouvernement partage bien évidemment l'objectif de mieux lutter contre ces pratiques qui inspire la proposition de loi. Nous sommes conscients que la situation actuelle n'est pas satisfaisante pour beaucoup de Français.

Le Gouvernement est donc favorable à certaines mesures prévues par ce texte et souhaite procéder à l'examen de certaines autres qui méritent d'être davantage expertisées. Il s'agit d'un sujet complexe, tant en termes techniques que d'impact sur les comportements et l'emploi. L'absence d'étude d'impact ne nous met pas dans une situation confortable pour prendre position sur toutes les propositions.

Il est d'une part adéquat de mieux encadrer les obligations de transparence du démarcheur au début de la conversation engagée avec le consommateur, comme l'article 2 le prévoit. Il faut aussi renforcer Bloctel, à la fois par la loi et par des mesures non législatives.

Le Gouvernement est plus réservé quant aux mesures qui, sans apporter une réponse efficace à la fraude, pénaliseraient le démarchage respectueux de la réglementation. Cela pourrait être le cas de la mesure consistant à présumer que le consommateur est opposé à tout démarchage quel qu'il soit, et à rendre illégal tout démarchage qui n'a pas été explicitement demandé. Elle pourrait méconnaître le fait que le démarchage peut faire jouer la concurrence pour proposer de nouveaux produits et services aux consommateurs.

Le texte propose en outre d'imposer au démarcheur le recours à certains numéros. Nous souhaitons procéder avec les parties prenantes à une analyse plus détaillée de ce type de mesures et de leur efficacité. Se pose en particulier la question des effets pervers qu'elles auraient, au détriment des entreprises vertueuses. Toutefois une meilleure information des consommateurs sur l'origine de l'appel entrant mérite d'être étudiée avec attention.

Les discussions auxquelles ce texte donne lieu montrent qu'il est nécessaire de continuer à travailler pour garantir le meilleur niveau de protection possible à nos concitoyens tout en s'assurant de la robustesse des solutions proposées. Au-delà des solutions envisagées par la proposition de loi, il faut par exemple examiner avec l'ARCEP – Autorité de régulation des communications électroniques et des postes – et les opérateurs de téléphonie quels moyens techniques pourraient être mis en oeuvre pour limiter les appels en provenance de numéros furtifs et de sociétés de démarchage qui ne jouent pas le jeu, ne respectant pas le dispositif Bloctel ou utilisant des robots.

En outre, le Gouvernement estime nécessaire d'organiser une concertation avec toutes les parties prenantes, associations de consommateurs, représentants du monde économique, avant de revoir en profondeur l'encadrement de l'activité de démarchage. J'ai demandé à la DGCCRF – direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes – d'engager ce travail rapidement au sein du Conseil national de la consommation – CNC. J'invite les parlementaires intéressés par ces sujets à se joindre à cette concertation.

Par ailleurs le Gouvernement souhaite que le dispositif Bloctel soit renforcé. Bloctel doit être mieux connu et son contournement plus sévèrement sanctionné. Nous sommes favorables au renforcement des sanctions à l'égard des entreprises qui pratiquent le démarchage sans soumettre leur liste à Bloctel, afin que ces sanctions soient réellement dissuasives. À cet égard, la proposition de loi dont nous discutons aujourd'hui est bienvenue.

À ce jour, 55 procès-verbaux administratifs ont été dressés et trois procédures pénales engagées. Il faut aussi sensibiliser les consommateurs à l'importance des signalements et à la nécessité de bien renseigner Bloctel au sujet des appels reçus. Ceci fera l'objet d'une action de communication, également dirigée vers les entreprises. À ce jour, environ 700 entreprises ont adhéré à Bloctel, ce qui est très insuffisant.

Enfin, l'interface de Bloctel doit être évaluée et améliorée et des travaux du CNC pourront utilement nous éclairer sur ce point.

Il faut également lutter contre les autres pratiques frauduleuses sources d'appels intempestifs. Ainsi 40 % des réclamations sur Bloctel auraient pour origine des tentatives de fraude au numéro surtaxé. La DGCCRF a récemment mené en Gironde une action d'envergure concernant vingt-deux sociétés qui se sont livrées à des démarchages téléphoniques illicites. Mais très souvent, ces appels émanent de professionnels établis à l'étranger. C'est pour cela que les consommateurs doivent être mieux informés des mesures prises pour les protéger. Nous venons de rendre obligatoires les options de blocage des appels sortants vers les numéros surtaxés. Parlons-en davantage, et parlez-en dans vos circonscriptions.

La DGCCRF va poursuivre et intensifier sa politique de contrôle et sa coopération avec l'ARCEP et les opérateurs télécom afin que les contrevenants soient sanctionnés et que les mesures préventives contre cette fraude aux numéros surtaxés soient renforcées. Des travaux sont d'ores et déjà en cours pour durcir la réglementation.

Nous sommes déterminés à évaluer avec toutes les parties prenantes toutes les pistes envisageables pour mieux réguler le démarchage, faire cesser ces nuisances et sanctionner les fraudes. J'invite à nouveau les parlementaires à nous rejoindre dans cette démarche.

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