Intervention de Jean-Paul Lecoq

Séance en hémicycle du jeudi 21 juin 2018 à 21h30
Défense du droit de propriété — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Lecoq :

… pour proposer ensuite des solutions lourdes de conséquence pour des dizaines, voire des centaines de milliers de personnes. La justice doit faire son oeuvre.

Faire de la politique à partir de quelques faits divers est déjà une mauvaise chose en soi, mais, le ministre l'a également montré, lorsque ces faits divers sont faussés et tronqués, cela devient totalement irresponsable.

Ainsi, sous prétexte de faits divers mal rapportés, visant à émouvoir l'opinion publique, cette proposition de loi cherche en réalité à servir les plus forts et à enfoncer les plus faibles dans une précarité toujours plus grande, en ne laissant à l'État qu'un rôle de répression. Ce n'est pourtant pas en agitant des chiffons rouges, en laissant croire que les propriétaires risquent l'expropriation à tout moment – ce qui est heureusement totalement faux – , que nous parviendrons à lutter efficacement contre le mal-logement et contre le squat.

Puisqu'il faut restituer les phénomènes dans leurs contextes, permettez-moi de vous rappeler une statistique : en 2015, 1 940 demandes d'expulsion ont été formulées, ce qui représente 0,0054 % de l'ensemble des logements recensés en France en 2017 par l'INSEE. Par ailleurs, une autre vérité est que la grande majorité des squats ne s'établissent pas dans le domicile des personnes mais dans des locaux inutilisés, parfois depuis de nombreuses années.

Mais qu'en est-il de ces 1 940 demandes ? C'est justement là que le bât blesse. Car, à lire l'exposé des motifs de la proposition de loi, il y a de quoi penser avec effarement que le droit est confronté à un véritable vide juridique que cette proposition de loi vise à combler de toute urgence. Pourtant, au risque d'en décevoir certains, le droit encadre justement déjà, et très largement, le phénomène d'occupation sans droit ni titre. Le principe est celui de l'obtention d'une décision de justice, laquelle peut déjà être obtenue par le biais de la procédure du référé.

Il ne s'agit pas ici d'idéaliser quoi que ce soit : il est essentiel de faire respecter le droit des propriétaires, surtout lorsque l'occupation concerne leur résidence principale. Nous appuyons sur le fait qu'il est tout simplement inacceptable que des propriétaires soient privés de la jouissance d'un bien dont ils ont l'utilité. Pour autant, le droit le fait déjà et il n'est nul besoin de légiférer à nouveau.

De plus, la proposition de loi présente également un risque découlant de sa dangerosité car, en supprimant le bénéfice du DALO aux personnes condamnées pour une occupation sans droit ni titre, c'est bien là un autre droit consacré par la Constitution que vous remettez en question sans sourciller. En proposant d'étendre la notion de domicile à l'ensemble des propriétés bâties ou non bâties, vous ne vous embarrassez même plus des acquis de 2007, dont, je vous le rappelle, votre majorité d'alors était dépositaire.

En proposant d'accroître démesurément les marges de manoeuvre laissées aux propriétaires, vous participez à une opération de victimisation largement exagérée…

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