Intervention de Philippe Page

Réunion du jeudi 14 juin 2018 à 9h00
Commission d'enquête sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires

Philippe Page, FNME-CGT :

S'agissant du travail dissimulé, Mme Pompili a fait référence à ce que nous avons appelé « l'affaire Atlanco » sur le chantier de Flamanville : un véritable scandale, mettant à jour des manoeuvres de Bouygues dont le traitement social s'est révélé lamentable, s'agissant de salariés polonais qui, quasi clandestinement, un dimanche matin, ont été évacués par bus de la cité HLM où ils étaient logés.

Il ne s'agissait pas d'une INB, nous étions dans la phase chantier de génie civil. La CGT a porté l'affaire au tribunal, sans grand effet sur Bouygues, car le montant de l'amende ne changera sans doute pas grand-chose à ses méthodes. La présence syndicale a été fondamentale puisque nous avons pu dénoncer les méthodes de Bouygues sur le chantier. Cela a pris beaucoup de temps d'autant qu'il a fallu surmonter la barrière de la langue et que les personnes concernées ont dû prendre sur elles et faire preuve de courage pour dénoncer la situation.

Vous avez raison : Chypre, Dublin... À l'arrivée, des contrats de travail illisibles et surtout une protection sociale non garantie puisque des cotisations ont été prélevées alors que les salariés n'avaient aucune protection sur le sol français. Un dossier infernal ! Nous demandons qu'une telle situation ne soit plus rendue possible mais nous ne cachons pas nos craintes.

Comment la convention collective pourrait-elle répondre aux garanties sociales de ce que vous appelez, avec raison, une sous-traitance de masse ? Le phénomène de sous-traitance existe dans d'autres secteurs et à cet égard la convention se pose d'une façon générale. Hélas ! le législateur a permis au patronat de faire ce qu'il veut, c'est-à-dire qu'une entreprise peut relever de la convention collective des bureaux d'études alors que leurs salariés travaillent au coeur des centrales nucléaires, dans les bâtiments des réacteurs nucléaires. La convention dite Syntec a, en quelque sorte, « cancérisé » les conventions collectives de la métallurgie dans le secteur du nucléaire, engendrant, depuis environ quinze ans, un abaissement des garanties sociales des salariés. Mais tout cela est absolument légal ! Nous trouvons, quant à nous, cela tout à fait amoral.

Il y a deux façons de voir les choses.

Soit travailler à une vraie convention collective, sujet que nous avons déjà abordé dans cette salle il y a deux ou trois ans dans le cadre de la commission, dont Denis Baupin était rapporteur. La CGT avait présenté un certain nombre de projets constituant une base de convention collective.

Soit contraindre les employeurs de ce secteur à faire en sorte que les salariés de telle branche professionnelle dont c'est le coeur de métier et qui, pour certains d'entre eux, passent toute leur carrière dans la même activité, bénéficient de garanties liées au secteur d'activité. On pourrait d'ailleurs déterminer qu'à partir du moment où ces salariés travaillent dans la même activité plus de la moitié de leur carrière, ils bénéficient des garanties liées au secteur d'activité.

Il existe deux possibilités d'ouvrir le chantier, mais ce qui est certain, c'est qu'il faut absolument l'ouvrir !

M. Wulfranc s'est exprimé au nom du parti communiste. Je le relève puisqu'il nous a dit de quel club il faisait partie ! Merci.

La disparition du CHSCT pose la question de la représentation des salariés prestataires qui ne sera plus assurée. Elle nous renvoie à la négociation d'entreprise, bien plus compliquée qu'avant, vous l'aurez compris.

Jusqu'à présent, la loi sur la transparence de la sûreté nucléaire offrait des moyens supplémentaires aux CHSCT des INB. Dans les entreprises concernées, nous avions négocié des temps et des sièges supplémentaires pour analyser annuellement l'ensemble des éléments de la sûreté nucléaire. La loi TSN n'est pas remise en cause, mais dans la mesure où les CHSCT disparaissent, leurs prérogatives accordées par la loi TSN dans les INB s'envolent de fait ! Nous ne savons pas aujourd'hui quelles prérogatives nous pourrons obtenir puisque tout est renvoyé à la négociation d'entreprise.

Un mot rapide sur la médecine du travail. Le nucléaire n'est pas une réserve d'Indiens ! Les nouvelles mesures législatives en faveur d'une meilleure médecine du travail sont déclinées chez nous. Le vrai problème réside dans le manque de médecins du travail, dont souffrent certains sites, mais cette difficulté dépasse le seul cadre du secteur nucléaire.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.