Intervention de Jean-Christophe Lagarde

Séance en hémicycle du lundi 16 juillet 2018 à 21h30
Démocratie plus représentative responsable et efficace — Avant l'article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Christophe Lagarde :

Dans nos institutions – je ne parle pas ici de l'histoire de France – , le droit de grâce était en réalité le pendant de la peine de mort : il donnait au Président de la République la possibilité d'éviter l'exécution d'un homme par les institutions de notre pays lorsque subsistait, malgré le jugement d'un jury de cour d'assises, un doute qu'il estimait raisonnable. Cependant, depuis que la peine de mort a été heureusement abolie dans notre pays, ce droit a souvent été exercé par des présidents de la République fraîchement élus pour effacer des amendes ou pour intervenir dans le cours judiciaire d'une affaire.

Ce qui était historiquement un droit seigneurial – le seigneur avait le droit de grâce sur ses terres – est devenu un droit monarchique, qui a finalement été transféré à la République française. Au moment du passage de la monarchie à la République, de nombreuses pratiques ont été supprimées, mais pas celle-là. Cela signifie, mes chers collègues, que le Président de la République, parce qu'il a été élu par nos concitoyens – il serait abusif de parler de « l'onction » du suffrage universel – , aurait le droit d'outrepasser toutes les décisions de la justice française et d'accorder la grâce.

Je suis favorable à ce que l'Assemblée nationale puisse voter des lois d'amnistie, lesquelles sont générales, globales – elles visent à effacer des amendes ou d'autres condamnations. Mais qu'un individu, fût-il Président de la République, fût-il élu par la majorité de nos concitoyens, ait le droit d'aller à l'encontre des décisions des juges ou des jurés dans tel ou tel dossier et d'exercer le droit de grâce comme au temps des seigneurs ou des rois, c'est l'illustration même que nous demeurons, hélas, dans une vision monarchique de la fonction présidentielle.

Si nous supprimions cette pratique, de même que nous avons supprimé le mot « race » de la Constitution il y a quelques jours, nous supprimerions une part de cet imaginaire populaire qui veut que le Président de la République est un roi, même s'il est élu et si l'on peut lui couper la tête tous les cinq ans. Non, le Président de la République n'est pas un roi : il ne peut pas remplacer l'ensemble des autres pouvoirs. Il existe un pouvoir exécutif – c'est lui – ,…

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