Intervention de Julien Aubert

Séance en hémicycle du mercredi 18 juillet 2018 à 15h00
Démocratie plus représentative responsable et efficace — Après l'article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJulien Aubert :

Mme Untermaier a posé les termes du débat. En réalité, ce que vous proposez, monsieur David, existe déjà, aux termes de l'article 47 alinéa 2 de la Constitution, lequel définit le rôle de la Cour des comptes. Le GAO – Government Accountability Office – américain et le NAO – National Audit Office – britannique ressortissent à un autre système, dans lequel l'office d'évaluation est rattaché au Parlement.

Le modèle français – adopté par une soixantaine de pays au monde – est un modèle juridictionnel, dans lequel la Cour des comptes est indépendante tant du pouvoir exécutif que du pouvoir législatif. Elle est donc à équidistance – selon un mot cher à feu Philippe Séguin – des deux pouvoirs : elle assiste le Parlement et, en même temps, contrôle le pouvoir exécutif.

On pourrait débattre de l'opportunité d'en faire un pouvoir public, ce qui renforcerait sans doute son rôle. Toutefois, j'appelle votre attention, chers collègues, sur le fait qu'il ne s'agit pas simplement d'un débat d'école.

En effet, tout dépend du système de fonction publique dans lequel on s'inscrit. Dans le système français, qui est organisé par corps de fonctionnaires, si vous appartenez à la fonction publique parlementaire, vous êtes à part. Même si certains effectuent des allers-retours entre l'assemblée dont ils relèvent et les ministères, leur nombre est assez faible – d'ailleurs, on trouve assez peu de fonctionnaires de l'Assemblée nationale en détachement à la Cour des comptes.

Or, pour bien contrôler le pouvoir exécutif et les politiques publiques, une forme de brassage avec cette administration est nécessaire. Créer un office parlementaire d'évaluation – outre le fait que celui-ci fera doublon avec la Cour des comptes – fait courir un risque en matière d'accès à l'information. Ce matin encore, le rapporteur général de notre commission des finances, Joël Giraud, a déploré la difficulté d'obtenir les chiffres de Bercy.

L'avantage de la Cour des comptes est double. D'une part, ses fonctionnaires sont magistrats ; d'autre part, ils font des allers-retours entre les administrations de l'État – dont ils sont partie intégrante – et des missions de contrôle. Il en résulte qu'ils bénéficient d'un meilleur accès à l'information, d'une part, et d'autre part qu'ils peuvent assister les débats politiques et y introduire de l'objectivité. En effet, ceux-ci courent le risque évident de tout politiser à l'extrême. Un thermomètre indiquant la température ambiante est donc nécessaire, notamment en matière budgétaire.

Sur le fond, l'amendement s'inscrit dans un débat bien plus profond et ancien, ouvert en réalité il y a quasiment un siècle. J'estime qu'il serait contre-productif de créer un doublon – à moins que l'on ne décide de supprimer la Cour des comptes. Attention, chers collègues : si nous rattachons celle-ci au Parlement, notre modèle, tel qu'il a été bâti et garanti par la loi, perdra son intérêt.

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