Intervention de Pierre Larrouturou

Réunion du mardi 3 juillet 2018 à 16h30
Mission d'information sur la gestion des évènements climatiques majeurs dans les zones littorales de l'hexagone et des outre-mer

Pierre Larrouturou, économiste :

Soit on est tétanisé par la situation inquiétante de certains pays européens et on ne fait rien, soit on considère qu'il faut agir et aller vite. Une tribune intitulée « Maintenant ou jamais », signée par Pascal Lamy, Miguel Angel Moratinos et Denis MacShane, sera publiée dans la presse ces jours-ci.

Rappelons que deux semaines ont suffi à Robert Schuman et à Konrad Adenauer pour prendre la décision révolutionnaire, selon le titre du Figaro d'alors, qui a consisté à créer la Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA) alors que cela faisait des décennies que les pays européens étaient en conflit et que les guerres qu'ils s'étaient livrés avaient fait des millions de morts. Adenauer a pu dire que cela avait été le plus beau jour de sa vie, qu'il avait vu le ciel s'ouvrir devant lui.

La semaine dernière, à Rennes, Jean Jouzel et moi-même avons participé à un débat organisé par la maison de l'Europe de Rennes, l'université de Rennes et Ouest-France, dont le titre était : « Et si l'Europe était la dernière chance pour sauver le climat ? Et si le climat était la dernière chance pour sauver l'Europe ? » Il n'y a peut-être plus beaucoup de sujets susceptibles de rassembler les pays européens. L'accord entre Mme Merkel et M. Macron était à peine signé que neuf pays ont déclaré qu'ils n'en voulaient pas et qu'ils étaient las des initiatives du couple franco-allemand. Parmi eux figuraient les Pays-Bas, alors que s'il y a bien une chose qui pourrait bénéficier à ce pays, c'est un traité sur le climat qui l'aiderait à financer des actions de lutte contre le dérèglement climatique.

L'année 2018 est fondamentale. Avec Trump, nous savons que la COP24 ne peut aboutir à aucun accord ambitieux. Il y a certes la réunion du G7, que vous avez citée, Madame la Présidente, mais nous visons plus particulièrement le sommet des chefs d'État et de gouvernement européens qui se tiendra le 13 et le 14 décembre prochain à Bruxelles, sommet historique selon Mme Merkel et M. Macron. Depuis la chute du mur, il y a trente ans, on ne cesse de se demander où va l'Europe et quels sont ses projets. Dans cinq mois, son avenir se décidera. Il serait bon qu'un grand nombre de parlementaires, de tous horizons, incitent Mme Merkel et M. Macron à débloquer les financements pour accélérer le mouvement dans les territoires. La Chancelière allemande a compris que la situation était en train de s'aggraver et qu'il fallait prendre les décisions en 2018 pour voir un accord ratifié en 2019. Si le nouveau traité était adopté le même jour que les élections européennes, en mai 2019, cela aurait de l'allure. Le grand philosophe allemand Jürgen Habermas a formulé le voeu que les référendums portant sur les traités soient organisés la même semaine dans tous les pays de l'Union européenne. Ce serait une bonne façon de signifier que l'Europe n'est pas aux mains des lobbies et des banques, mais qu'elle est là pour mettre la finance au service du bien commun, au service des peuples. Ceux qui ont voté pour des partis comme la Ligue ou le Mouvement Cinq Étoiles doivent pouvoir constater qu'il y a de l'argent européen qui arrive sur leurs territoires et qui les aide à créer des emplois. Il y a urgence pour lutter contre le réchauffement climatique qui fait des morts partout dans le monde. Il y a urgence pour sauver l'Europe. Nous savons que nous ne parviendrons sans doute pas à l'unanimité mais pour entraîner déjà l'adhésion de dix ou onze États-membres, nous devons mettre cette idée sur la table le plus rapidement possible.

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