Intervention de Jean-Christophe Lagarde

Séance en hémicycle du jeudi 19 juillet 2018 à 21h40
Démocratie plus représentative responsable et efficace — Après l'article 2

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Christophe Lagarde :

Avec votre autorisation, monsieur le président, j'aimerais défendre en même temps mes amendements nos 255 et 256 , qui sont de même nature et concernent tous les deux l'article 34-1 de la Constitution.

Cet article a été introduit en 2008 pour permettre au Parlement – c'était un nouveau droit qu'on lui accordait – de voter un certain nombre de résolutions. Mais, pris de frayeur, et même d'une sorte de phobie, le pouvoir exécutif de l'époque a absolument voulu ajouter que le Parlement ne pouvait pas formuler d'« injonctions » à l'égard du Gouvernement. L'amendement no 255 vise à supprimer purement et simplement cette mention.

L'amendement no 256 , quant à lui, vise à préciser que le Parlement ne peut pas formuler d'injonctions « d'ordre juridique ». Cela signifie que le Parlement ne peut pas obliger juridiquement le Gouvernement à faire quelque chose. Mais, puisqu'il arrive que l'on fasse de la politique dans l'hémicycle, le Parlement serait autorisé à formuler des injonctions politiques.

Je pense depuis plusieurs années – et je l'ai exprimé à plusieurs reprises au cours de notre débat – que le drame de notre pays, c'est que si le Gouvernement et le Président de la République sont très puissants, le Parlement, lui, est impuissant. Vous rendez-vous compte que le Parlement n'a pas le droit de formuler des injonctions politiques à l'égard du Gouvernement ? S'il en avait la possibilité, cela ne changerait rien, et le Gouvernement pourrait continuer de faire ce qu'il veut, mais l'Assemblée nationale devrait au moins pouvoir se tourner vers le Gouvernement, qui est responsable devant elle, et elle devrait pouvoir lui enjoindre de faire certaines choses, par exemple de le mandater pour une négociation internationale. Or le Parlement ne le peut pas : c'est ce qui est écrit dans notre Constitution.

On nous dit – et j'espère que ce sera le cas – que ce projet de loi constitutionnelle a pour but de renforcer les pouvoirs du Parlement. En l'occurrence, je propose de renforcer son pouvoir politique, en lui permettant de s'adresser au Premier ministre et de formuler des demandes. Ce n'est pas grand-chose, mais c'est tellement naturel dans tous les parlements de toutes les démocraties du monde que je ne pourrais pas comprendre que vous ne l'acceptiez pas.

Cela ne coûtera rien, cela ne changera rien, si ce n'est que les parlementaires ne seront plus obligés d'utiliser des biais détournés et de formuler leurs souhaits au conditionnel, dans leurs propositions de résolution. Au lieu de dire : « il serait souhaitable », le Parlement pourra dire : « il nous semble souhaitable ». Le Gouvernement pourra toujours s'y opposer, mais le Parlement, au moins, pourra s'adresser à lui. Un Parlement qui ne peut pas s'adresser au Gouvernement, est-ce vraiment un Parlement ?

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