Intervention de Gérard Cherpion

Séance en hémicycle du lundi 23 juillet 2018 à 16h00
Liberté de choisir son avenir professionnel — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Cherpion :

Vous ne leurrez personne. Le seul but de cette manoeuvre est de faire porter le chapeau de vos décisions, la baisse des droits qui s'amorce, aux partenaires sociaux, et j'espère sincèrement que ceux-ci ne vont pas se laisser enfermer dans ce mauvais rôle.

Je regrette également l'attitude, tant du Gouvernement que de la majorité, face au texte amendé par le Sénat. Le Sénat a joué son rôle. Il n'a pas bouleversé ce projet de loi, il n'a jamais franchi de lignes rouges. Il a au contraire amélioré le texte et l'a rééquilibré. Malheureusement, ancrée dans une posture idéologique et fermée, la majorité a abordé la commission mixte paritaire avec la volonté, et peut-être l'ordre, de la faire échouer. À aucun moment vous n'avez essayé d'avancer dans l'intérêt des Français et de la France. À aucun moment vous n'avez tenté de trouver un accord avec le Sénat. Et vous n'avez pas davantage essayé de le faire avec l'Assemblée nationale, où vous méprisez les oppositions. Vous restez arc-boutés sur votre certitude de détenir seuls la vérité.

Pourtant, ni l'opposition à l'Assemblée nationale, ni le Sénat, n'est dans un rôle d'opposant systématique. Notre seule volonté est d'améliorer ce texte, pour permettre aux Français de vivre mieux. Sur le fond, votre projet ne va pas dans le bon sens. Pire, il réduit les droits individuels. Comment l'apprentissage sortirait-il grandi d'un projet qui le confie à 400 branches professionnelles, dont moins de dix ont la structure nécessaire pour assurer la responsabilité que vous leur confiez ? Comment ces 400 branches, qui ne couvrent pas tous les salariés, feront-elles mieux que les dix-huit régions de notre pays ?

Comment les salariés pourront-ils se former tout au long de leur vie, avec des droits amoindris, avec un CPF monétisé, qui transforme la formation en un bien de consommation ordinaire, avec un CPF moins financé qu'avant ? Comment favoriser le travail des personnes handicapées avec un texte qui ne cesse de faire l'objet de revirements ? Enfin, que font dans votre projet de loi les articles concernant la fonction publique, alors qu'une loi sur ce sujet précis a été annoncée et que les concertations ne sont pas terminées ? Ce cavalier législatif fera lui aussi partie de notre recours au Conseil constitutionnel.

Ce projet de loi opère également une recentralisation jamais vue, avec un nouvel organisme, France compétences. Cet organisme, omnipotent et omniprésent dans le domaine de la formation professionnelle, sera exclusivement à la main du Gouvernement, comme en témoigne la composition de son conseil d'administration. Vous avez même refusé un amendement de notre collègue Francis Vercamer prévoyant que le directeur général de France compétences soit auditionné par le Parlement avant sa nomination. Je me réjouis que cet amendement, qui a été examiné au titre de l'article 88, ait reçu un avis favorable et je souhaite qu'il soit adopté. Mais que craignez-vous, madame la ministre ? Pourquoi vous entêtez-vous à diminuer le pouvoir du Parlement ? Pourquoi avoir peur des représentants du peuple que nous sommes ?

Votre projet de loi manque de hauteur. Pire encore, malgré une majorité aux ordres, vous continuez à ressentir le besoin de légiférer par voie d'ordonnance. La situation est-elle si urgente, madame la ministre, qu'il faille avoir recours aux ordonnances, projet de loi après projet de loi ?

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