Intervention de Muriel Pénicaud

Séance en hémicycle du mercredi 25 juillet 2018 à 15h00
Liberté de choisir son avenir professionnel — Article 40 a

Muriel Pénicaud, ministre du travail :

Défavorable. Permettez-moi de revenir sur le fond de ce sujet important, qui suscite un débat non seulement en France, mais aussi en Europe et dans le monde.

Alors que les plateformes numériques se multiplient, le nombre de personnes travaillant dans ces conditions augmente. Certaines veulent absolument rester sous statut indépendant, mais d'autres préféreraient passer sous statut salarié – la demande sociale est assez variée sur le sujet. Si une minorité de plateformes ont embauché des salariés, la plupart ont choisi de passer par des travailleurs indépendants dont certains, je le répète, veulent rester indépendants et refusent de devenir salariés. Il faut donc prendre en compte ces deux dimensions.

Cette tendance, qui touche tous les pays du monde, a du mal à rentrer dans les cases, si je puis dire. Elle a donc déjà suscité une jurisprudence abondante. Ainsi, la Cour de cassation a récemment reconnu que ces personnes étaient bien des travailleurs indépendants, ce qui n'exclut pas l'existence d'un certain nombre de protections collectives.

Quelles sont donc ces protections ? La protection contre les accidents du travail et les maladies professionnelles, dite AT-MP, existe déjà aujourd'hui. Le projet de loi propose de mettre en place deux briques supplémentaires, ce qui n'épuisera pas la question pour autant.

La première brique est le droit à la formation, avec un CPF renforcé. Ainsi, les plateformes devront payer le CPF des prestataires indépendants qui travaillent avec elles, ce qui est d'autant plus important que la plupart de ces personnes sont assez peu qualifiées et risquent de se retrouver dans une trappe de carrière. La situation serait tout à fait différente si cette activité représentait un tremplin leur permettant d'évoluer.

La deuxième brique consiste à avancer sur l'élaboration de chartes prévoyant des règles communes, qui devraient être connues à l'avance par les travailleurs indépendants. Ces chartes porteraient, par exemple, sur l'amplitude des heures d'activité ou sur les systèmes de connexion-déconnexion, un sujet qui a déjà fait l'objet de nombreux débats.

Ce n'est pas du tout un solde de tout compte. Nous sommes bien conscients que le sujet est plus vaste, mais il est bon d'avancer dès à présent sur les questions que nous évoquons dans le cadre du présent projet de loi. Le Président de la République a discuté avec les partenaires sociaux il y a quelques jours, et le statut des travailleurs indépendants sur les plateformes en France a été retenu comme thème de travail. Ainsi, à l'occasion de l'anniversaire de l'Organisation internationale du travail – OIT – , qui aura 100 ans l'année prochaine, la délégation française sera très investie sur ce sujet. Ce dernier pourra également être traité dans le cadre du G7 puisque, comme vous le savez, la France présidera le G7 en 2019 et que le Président de la République a décidé l'organisation d'un G7 social. À la demande des partenaires sociaux, le statut des travailleurs indépendants sera l'un des thèmes abordés.

Encore une fois, ces deux mesures ne sont pas un solde de tout compte. Cependant, elles représentent un progrès : tout ce qui va dans le sens d'une sécurisation est bon à prendre. C'est pourquoi le Gouvernement est défavorable à ces quatre amendements de suppression.

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