Intervention de Olivier Schrameck

Réunion du mardi 17 juillet 2018 à 17h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Olivier Schrameck, président du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) :

Sur le problème des handicapés, nous pensons en effet qu'il faut citer les bons élèves et que le name and shame, comme disent les Anglo-Saxons, ne doit rester qu'un pis-aller. Nous devons en effet en priorité encourager tous ceux qui font des efforts considérables en ce sens, notamment en adhérant librement à ces chartes. Ils ont compris que tel était leur intérêt et leur initiative mérite d'être saluée.

Il est vrai également que nous n'avons pas lieu d'être fiers du taux de personnes handicapées travaillant au CSA, qui est de 4,5 % alors que l'obligation d'emploi dans la fonction publique est fixé à 6 %. Nous avons cependant progressé, car avant mon arrivée nous étions sous la barre des 2 %. L'obligation d'emploi est très difficile à mettre en pratique mais je dois dire aussi que nos collaborateurs ou collaboratrices handicapés font un travail remarquable. Je profite de cette occasion que vous m'offrez pour saluer leur travail, comme je salue celui de l'ensemble des collaborateurs du CSA et des CTA.

Concernant la réforme de la programmation publique, je peux vous donner mon avis personnel, mais non celui du CSA, le collège n'ayant pas délibéré. Je pense comme vous qu'il faut que cette réforme favorise la cohésion et la proximité, mais je ne crois pas que les programmes régionaux de France 3 y parviendront seuls. J'ai lu en effet que la ministre de la Culture souhaite tripler le nombre d'heures régionales de France 3. Cependant, le problème est plus global et touche à la fois France 3 et France Bleu : pour accroître la portée et l'efficacité du service local de l'information en gagnant en cohésion et en faisant des économies, il me semble impossible de distinguer entre Radio France et France Télévisions. L'un et l'autre sont également concernés.

Madame Le Grip, je n'ai aucunement l'intention d'esquiver les problèmes que nous rencontrons avec RT France. En septembre 2015, après plusieurs mois de discussion, nous avons signé une convention avec cette chaîne. RT a longtemps refusé les stipulations de cette convention relatives au pluralisme et à la rigueur de l'information. Pourquoi les avons-nous demandées ? Non pour des questions d'origine ou de politique internationale, mais parce que nos interlocuteurs de RT s'étaient réclamés de personnalités qui avaient toutes plus ou moins les mêmes tropismes. Or, si la jurisprudence du Conseil d'État admet les radios d'opinion, elle ne l'accepte pas pour les télévisions.

Cette convention signée, nous constatons que, pendant deux ans, rien ne se fait. Lorsque la décision a été prise de lancer la chaîne, en décembre 2017, j'ai dit publiquement que RT, étant donné ses particularités, serait à ses débuts systématiquement observée par le CSA. Et je peux vous assurer qu'un sociologue qui étudierait nos constatations sur les programmes de cette chaîne montrerait aisément que l'information y est présentée sous un certain angle et que la manière dont y est évoqué notre pays ne correspond guère à l'allégresse nationale dont je parlais en commençant mon propos. Nous sommes donc attentifs, mais nous n'avons aucunement l'intention d'opprimer une chaîne.

Quant aux conséquences que cela peut avoir, ce n'est pas à nous d'en juger. Certes, tous les médias ont des conséquences internationales. La loi elle-même prévoit d'ailleurs que le CSA soit consulté sur tous les actes européens ou internationaux, parce que la politique des médias est aussi une politique internationale. La règle que nous suivons est simple : si on souhaite que pour certaines chaînes notre pouvoir soit amoindri ou tamisé, nous obéirons ; mais dès lors qu'on ne nous dit rien de tel, nous appliquons la loi à la lettre.

La question qu'a posée Monsieur Attal est fondamentale. La loi ne prévoit, dans son article 1er, qu'une seule limitation à la liberté de communication, qui est le respect de la propriété d'autrui. Les problèmes qu'il a soulevés sont des problèmes de répartition de la valeur, et donc de juge de contrat. À sa question, je réponds qu'effectivement, si nous choisissons d'intervenir dans ces problèmes de répartition de la valeur, nous aurons besoin du législateur. Je crois d'ailleurs savoir qu'une société d'ayants droit a suggéré le dépôt d'un amendement en ce sens. Je rejoins ainsi ce que je disais au début de mon exposé, à savoir que la possession et l'usage des droits est l'un des principaux leviers de la régulation.

Madame Calvez, dans l'étude Avenir de l'audiovisuel : construire le meilleur, le public se trouve mentionné, il est vrai non comme acteur mais comme variable. Je précise à ce sujet que cette étude n'a pas été rédigée par nous : elle est l'oeuvre des experts du CSA Lab qui, pour la réaliser, ont fait une analyse matricielle extrêmement élaborée. Certains de leurs choix – je ne pense pas particulièrement à celui-ci – sont quelque peu contestables, mais c'est là une conséquence de la méthode suivie, dite des « futuribles ». Et je vous concède bien volontiers que ce type de présentation consistant à retenir trois solutions dont l'une joue un rôle de repoussoir a quelque chose de rhétorique – et il montre aussi que le CSA Lab, qui est composé d'experts, n'est guère politique. J'espère que le scénario de fracture ne correspondra jamais, même de loin, à la réalité. Mais il vaut mieux maximiser les sujets de crainte que refuser de les envisager.

En ce qui concerne le rôle des femmes et leur place dans la publicité, je souhaite indiquer qu'à mon arrivée au CSA, j'ai pris deux initiatives : la première a été de créer le groupe de travail « Éducation et médias », la deuxième a été de faire avancer le droit des femmes. C'est dans ces deux domaines que nous avons fait le plus de progrès, même s'il en reste encore beaucoup à faire. Je vous garantis en tout cas que le groupe de travail, sa présidente et moi-même y attachons une importance considérable.

Sur le conseil de déontologie de la presse, je peux vous assurer que nous ne demandons pas mieux que d'être appuyés. Votre question me fait me souvenir des discussions qui eurent lieu il y a une douzaine d'années au sein d'une commission que je ne citerai pas. La question de l'unification du contrôle déontologique s'était alors posée et avait conduit à prendre contact avec les milieux de la presse. Nous ne sommes jusqu'à présent jamais parvenus à une solution concrète, mais je continue de discuter de ces questions avec des spécialistes. Les problèmes de la presse ont d'ailleurs leurs spécificités qui obligent à distinguer entre les problèmes de l'image, du son et du signe, qui sont en partie différents.

Je crois avoir répondu à toutes vos questions.

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