Intervention de M'jid El Guerrab

Séance en hémicycle du jeudi 13 septembre 2018 à 21h30
Équilibre dans le secteur agricole et alimentaire — Article 10

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaM'jid El Guerrab :

Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, ma brève intervention sur cet article remplacera les propos que je n'ai pas pu tenir hier.

Ce projet de loi était attendu : il s'agit non seulement de rénover les relations économiques entre les acteurs des filières agricoles et agroalimentaires, mais aussi de définir les objectifs d'une politique de l'alimentation rompant avec les précarités alimentaires.

Pour reprendre les mots du Président de la République, les objectifs majeurs de ce texte sont, d'une part, de permettre aux acteurs de ces filières de « vivre du juste prix » et, d'autre part, de « permettre à chacune et à chacun d'avoir accès à une alimentation saine, durable, sûre ». Voilà pourquoi les travaux des états généraux de l'alimentation ont grandement inspiré ce projet de loi. Il y a lieu de se réjouir de cette concertation, car c'est ainsi que l'on favorise le développement durable et le progrès pour tous. La démocratie participative doit être renforcée dans la préparation de tous les textes de loi.

D'un point de vue économique, l'ambition de l'exécutif est de remédier à la dissymétrie entre la production, qui est très atomisée, et la distribution, qui s'avère concentrée. Il importe que les intérêts des producteurs soient davantage valorisés. En effet, la situation de la filière agricole est particulièrement fragile : en témoigne une dégradation importante des marges nettes. Ainsi n'est-il pas toujours possible de couvrir les coûts de production. À cela s'ajoutent les fluctuations des marchés, un endettement croissant et une période de crise économique.

Il est heureux que le projet de loi soumis à notre Assemblée prenne la mesure de ces défis et s'efforce de compenser les déséquilibres. Cette prise de conscience est positive.

Parmi les avancées de ce texte, je tiens à mentionner le recours à une médiation plus efficace en cas de désaccord sur les contrats, le relèvement du seuil de revente à perte, l'encadrement des promotions, ainsi que l'amélioration de la lisibilité et de l'efficacité des règles applicables. Ce sont là des aspects positifs du projet de loi. Je salue également le fait que ce texte contribue à l'évolution profonde des systèmes agricoles vers davantage de qualité, de respect du bien-être animal et de l'environnement, ainsi que vers une alimentation plus saine.

Malheureusement, malgré ces apports, des défauts subsistent, à l'instar de l'étiquetage des modes de production pour les produits issus de l'élevage.

Puisque mon temps de parole est limité, je souhaite me concentrer plus particulièrement sur un point qui m'est cher : l'interdiction du glyphosate. J'ai déposé un amendement en ce sens. Ma proposition vise à inscrire dans la loi l'interdiction de l'utilisation du glyphosate, substance jugée comme cancérogène probable par l'Organisation mondiale de la santé. Je souhaite que le glyphosate soit prohibé lorsque des solutions alternatives existent, et ce dans un délai de trois ans, afin d'octroyer aux utilisateurs une période de transition.

Aujourd'hui, 8 000 requêtes judiciaires aux États-Unis concernent l'herbicide au glyphosate de Monsanto. L'entreprise a été condamnée en août dernier à verser 289 millions de dollars à un jardinier qui utilisait ce produit. En France aussi, des plaintes ont été déposées contre Monsanto et l'absence de prévention vis-à-vis du glyphosate. Les enjeux de santé publique liés à l'usage de ce produit doivent nous inciter à adopter dès à présent une meilleure réglementation.

Par ailleurs, des travaux pourront être menés sur les produits de substitution, en s'appuyant sur l'état des lieux dressé par l'Institut national de la recherche agronomique, dans son rapport de novembre 2017, intitulé Usages et alternatives au glyphosate dans l'agriculture française. Il ne faut pas laisser les agriculteurs sans solution pour opérer la transformation des systèmes agricoles nécessaire à la protection de l'environnement et de la santé des consommateurs français. J'en sais quelque chose car je suis originaire du Cantal, département qui compte de nombreux agriculteurs.

Je regrette également que ce texte ne traite pas la question plus globale de nos échanges agricoles avec les pays du bassin méditerranéen. Je voudrais citer mon ami, le regretté Cosimo Lacirignola, ancien secrétaire général du Centre international de hautes études agronomiques méditerranéennes qui soulignait une urgence : « lutter contre le triple gaspillage des ressources naturelles, de la nourriture et des connaissances ». Il faut que chaque région, territoire ou nation puisse accéder à la sécurité alimentaire. La France a un rôle important à jouer dans cette équation.

Je souhaite que cette nouvelle lecture du projet de loi soit l'occasion d'en pallier les carences, notamment en ce qui concerne l'interdiction du glyphosate.

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