Intervention de Gérald Darmanin

Séance en hémicycle du lundi 17 septembre 2018 à 16h00
Lutte contre la fraude — Article 1er

Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics :

Ma réponse aux intervenants me permettra d'expliquer pourquoi je rejetterai les amendements visant à supprimer la police fiscale.

Monsieur Coquerel, vous m'avez demandé où j'irai chercher les agents de la police fiscale, et comment celle-ci fonctionnera dans le cadre moderne que j'ai présenté tout à l'heure. Nous allons bien procéder à des recrutements supplémentaires, monsieur Coquerel : nous publierons bientôt les trente fiches de postes. Nous recruterons notamment des agents contractuels qui, dès le 2 janvier, si le Parlement adopte la décision, iront se former à l'école nationale des douanes de Tourcoing. Ils sortiront diplômés au mois de juin : la police fiscale n'est donc pas rejetée aux calendes grecques. Les postes seront publiés. Les agents ne seront donc recrutés ni au sein des services actuels de la DGFIP, sauf si un volontaire souhaite donner un tournant à sa carrière, ni au sein des services qui s'occupent des enquêtes douanières ou de la BNRDF. J'affirme ce point devant la représentation nationale, je ne peux faire mieux.

Ensuite, vous faites un lien entre les suppressions de postes au sein de la DGDIP et le contrôle fiscal. Vous avez évoqué la suppression d'au moins 30 000 postes depuis les quinquennats de M. Sarkozy et de M. Hollande. Mais aucun poste de vérificateur fiscal n'a été supprimé, ni par le président Sarkozy, ni par le président Hollande, ni, l'année dernière, par le président Macron au cours de la première année de son quinquennat.

La DGFIP se consacre à de nombreuses autres missions que le contrôle fiscal : elle accompagne les collectivités territoriales, s'occupe de l'évaluation du domaine et de l'immobiler, et accomplit encore de nombreuses autres missions de l'État qui connaissent de profonds changements. Cette évolution des missions de l'État peut faire l'objet d'un désaccord entre nous, mais ce n'est pas le sujet du texte que nous examinons.

Vos interrogations, monsieur Bricout, rejoignent celles de Mme Pires Beaune. Je tiens à affirmer qu'il n'y a pas de lien à établir entre les trésoreries et ce nouveau service. Je sais que, dans l'Aisne, une trésorerie est en sursis : j'aurai l'occasion, monsieur le député, de revenir vers les parlementaires pour évoquer les évolutions de la carte territoriale, y compris dans le beau département de l'Aisne où je me rendrai bientôt. Vous serez évidemment convié.

Tout en répondant à M. le président Woerth, je souhaite défendre l'article 1er. Je regrette de n'avoir pu convaincre le Sénat, et de ne pas avoir entièrement répondu aux interrogations sur l'avis du Conseil d'État, que nous devons forcément prendre en compte pour améliorer le dispositif. La démarche du président Woerth est la bonne : la question n'est pas d'ordre idéologique, elle vise l'efficacité.

La loi Perben a créé le service des enquêtes douanières. D'ailleurs, en me replongeant dans les débats de l'époque, je me suis aperçu que les mêmes questions avaient été posées – je pense que vous ne me contredirez pas, monsieur Woerth. Le service des enquêtes douanières, qui dispose aujourd'hui d'armes particulières – saisi par un magistrat, il instruit des dossiers, organise des filatures, procède à des écoutes – n'allait-il pas concurrencer le ministère de l'intérieur ? La réponse a évidemment été non. Ces deux services ne font pas tout à fait la même chose, d'autant que les effectifs de police du ministère de l'intérieur se consacrent de plus en plus – en tout cas, plus qu'en 2004 ou 2005 – aux enquêtes relatives à la grande délinquance et à la lutte contre le terrorisme, ce qui est d'ailleurs tout à fait logique. S'il y a quelque chose à améliorer, ici ou là, c'est en termes de complémentarité entre les deux services, et non de substitution.

J'en viens à un point très important, qui est peut-être source de confusion depuis le début de nos débats : il incombera au magistrat de choisir le service qu'il va saisir. Cela me permet, par la même occasion, de répondre à l'interpellation de M. Diard lors de la discussion générale. Ce n'est pas le ministre de l'action et des comptes publics qui demandera au ministre de l'intérieur de laisser intervenir son service. C'est d'ailleurs ainsi que fonctionne le service des enquêtes douanières, qui est dirigé par une magistrate à Bercy – vous pouvez très bien le visiter et rencontrer les femmes et les hommes qui y travaillent, parmi lesquels se trouvent des collaborateurs que nous mettons à disposition. Ce n'est pas le ministre chargé du budget qui demande à la magistrate de mener telle ou telle enquête. Comme d'habitude sur d'autres sujets, le magistrat, qui dispose d'un panel de services, choisit de saisir la BNRDF, au sein de l'Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales – OCLCIFF – , ou le service des enquêtes douanières, la police fiscale ou toute autre police – libre à lui de saisir la police judiciaire s'il en a envie. Je le répète, il n'y a pas de problème d'organisation ou de concurrence des polices, puisque ce projet de loi confie à l'autorité judiciaire le soin de mener des enquêtes sur ce qui relève de la fraude.

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