Intervention de Stéphane Travert

Réunion du mardi 18 septembre 2018 à 18h15
Commission d'enquête sur l'alimentation industrielle : qualité nutritionnelle, rôle dans l'émergence de pathologies chroniques, impact social et environnemental de sa provenance

Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation :

Monsieur le président, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les députés, je vous remercie pour cette invitation à échanger ensemble. C'est en tant que ministre de l'alimentation que je suis ici ce soir. Je dispose d'une feuille de route interministérielle, fixée par le Premier ministre et le Président de la République. Mon action vise à défendre une alimentation plus sûre, plus saine, plus durable, de qualité pour tous.

Le projet de loi EGALIM dont nous avons débattu la semaine dernière, et qui a été adoptée en deuxième lecture à l'Assemblée nationale, est un des outils majeurs de cette politique. C'est à ce titre, et dans le respect des compétences qui sont miennes, que je suis devant vous. Je laisserai le soin à ma collègue ministre des solidarités et de la santé de s'exprimer sur les aspects relatifs aux pathologies chroniques, et à mon collègue du ministère de l'économie et des finances sur les additifs et les auxiliaires technologiques qui relèvent de sa compétence.

Vous le savez, nous avons souhaité, dans le cadre des Etats généraux de l'alimentation (EGA), traiter de l'ensemble des composantes de l'alimentation – volets économiques, environnemental, sociétal et sanitaire. L'alimentation est un des déterminants de la santé, au-delà des crises sanitaires. Elle s'inscrit pleinement dans les objectifs de santé publique du Gouvernement. Avoir une bonne alimentation, c'est se donner des atouts pour conserver une santé optimale, et introduire la notion de plaisir et de convivialité dans ces espaces précieux que sont les repas. C'est d'ailleurs une des armes les plus efficaces pour lutter contre l'obésité.

Il nous faut maintenant collectivement nous interroger sur ce qu'est une bonne alimentation à l'heure où les Français veulent des produits de qualité, notamment au plan gustatif, sanitaire et environnemental, et alors que nos modes de vie ne nous permettent pas toujours de consacrer autant de temps qu'auparavant à cuisiner. Or une bonne alimentation est une alimentation diversifiée qui associe tous les types d'apports nutritionnels, répartis sur une semaine, de façon à s'adapter aux aléas du quotidien.

Cela étant, une bonne alimentation doit-elle être composée uniquement de produits labellisés issus de circuits courts de l'agriculture biologique ? Vous le savez, il est toujours difficile d'espérer manger un bon avocat cultivé en France... Nous avons donc besoin de travailler sur ces sujets.

La feuille de route des États généraux de l'alimentation propose à ce titre différents leviers comme la prévention et l'éducation, notamment des plus jeunes, ou encore ce dispositif inscrit dans la loi EGALIM qui constitue une réelle avancée pour une alimentation sûre, saine, durable et accessible à tous, celui d'un approvisionnement de la restauration collective à 50 % de produits sous signe d'identification de la qualité et de l'origine (SIQO) et à faible impact environnemental dont 20 % de bio à l'horizon 2022. Par le levier de la restauration collective, nous souhaitons toucher l'ensemble des Français, indépendamment de leur origine sociale. C'est aussi un moyen de sensibiliser tous nos concitoyens au bon goût, au bon, et à la necessité de bannir les produits trop sucrés, trop salés, trop gras, et de diversifier leur alimentation. Pour les enfants, c'est l'éducation au goût qui fera d'eux des adultes éclairés dans leurs choix de consommateurs. La transformation de nos modèles agricoles passe évidemment par une évolution de la demande vers le local, le label ou le bio.

Toute l'action publique du Gouvernement est mue par cette volonté d'offrir à tous les choix d'une bonne alimentation et de se battre pour que les agriculteurs disposent de meilleurs revenus pour travailler à la montée en gamme. Cela suppose d'innover, d'investir, de se battre pour une alimentation plus diversifiée et de meilleure qualité. Sur ces sujets-là, nous pouvons effectivement nous appuyer sur un certain nombre de mesures.

À cet égard, la PAC doit être un outil de transformation de notre agriculture. Celle-ci est actuellement en pleine transition. Nous devons utiliser cette période pour mettre en place des outils plus simples, plus efficaces, plus robustes qui permettent de prévenir les aléas climatiques et sanitaires, et de mieux protéger nos agriculteurs. Cette PAC devra également privilégier la qualité alimentaire – il y a un débat sur ce point au sein du Conseil agricole européen. Les opinions publiques forcent en quelque sorte les décideurs politiques à bouger dans ce sens. Il faut apporter une réponse européenne à la question de l'utilisation des produits phytosanitaires et des pesticides dans la production et dans les cultures, de même qu'en matière d'étiquetage des denrées alimentaires. Nous ne sommes pas encore vraiment entrés dans le détail de ce que sera la future politique agricole commune ; nous en sommes aux débats sur ce que sera son budget. Nous avons besoin d'un budget ambitieux qui nous permette demain d'afficher l'exigence d'une agriculture qui réponde aux souhaits des consommateurs de pouvoir accéder à une alimentation plus sûre et plus durable.

Nous avons travaillé sur un certain nombre de leviers, telle la restauration collective. Comme je le disais à l'instant, la loi a prévu un plan de diversification des protéines et fixé l'objectif que 50 % des produits servis dans la restauration collective soient issus de produits bios et à faible impact environnemental.

Par ailleurs, les échéances 2020, 2025 et 2028 conduiront à l'interdiction d'utiliser des matériaux à usage unique et des matériels de chauffe, notamment dans la restauration collective – autrement des produits et plats en plastique. Quant à la feuille de route concernant les produits phytosanitaires, elle prévoit la séparation des actions de vente et de conseil, la protection des riverains, le refus des rabais, remises et ristournes sur la vente des produits phytosanitaires, et, enfin l'interdiction des néonicotinoïdes.

Afin d'améliorer l'offre alimentaire et de diminuer certains impacts, nous avons travaillé, à travers ce texte de loi, sur la suppression du dioxyde de titane, et à la valorisation du miel de France grâce à un étiquetage d'origine pour le miel. Je rappelle qu'en 2016, nous avions obtenu, au niveau européen, la possibilité d'étiqueter l'origine des produits carnés et laitiers. Cette expérimentation s'achevant à la fin de l'année, nous avons commencé à chercher des alliés européens pour maintenir cette autorisation et ainsi pouvoir continuer à informer les consommateurs tout en valorisant nos productions de qualité et l'ensemble des territoires.

Nous nous sommes penchés tout particulièrement sur le gaspillage alimentaire qui, je le rappelle, représente 150 kilos par personne et par an, ce qui est beaucoup trop quand on connaît les ravages que peuvent causer des épisodes de famines dans certains pays. Il s'agit, à travers l'amélioration de l'offre de la restauration collective, de lutter contre le gaspillage alimentaire et ainsi de réaliser des économies qui permettront éventuellement de diminuer le coût des repas, d'en améliorer la qualité et donc de faire en sorte que nos enfants soient mieux nourris. Des conventions ont été passées entre la restauration collective et un certain nombre de collectivités, mais nous avons besoin de structurer cette offre. Il faut que les agriculteurs puissent se saisir de ces nombreux débouchés.

Tels sont les différents points que je souhaitais évoquer. Je suis bien évidemment prêt à répondre aux autres questions que vous jugerez utiles de me poser, et à discuter avec vous des outils et des leviers que nous pouvons prévoir pour permettre à tous les Français de disposer d'une alimentation sûre, saine, durable, variée et accessible à tous.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.