Intervention de Valérie Rabault

Séance en hémicycle du mardi 25 septembre 2018 à 15h00
Croissance et transformation des entreprises — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaValérie Rabault :

Ensuite, nous dénonçons l'absence d'action de votre part en matière de commerce extérieur, lequel est depuis dix ans l'une des grandes faiblesses de notre économie. Le décrochage a clairement eu lieu entre 2002 et 2008. La chute a été particulièrement aiguë dans l'industrie, notamment dans l'industrie automobile et dans les industries agro-alimentaires. Seul un secteur a progressé au début des années 2010, à rebours de tous les autres : celui des activités financières.

Or, en matière de commerce extérieur, notre politique publique n'est tout simplement pas au niveau. Pour s'en rendre compte, il suffit juste de regarder outre-Rhin ce qui se passe. En Allemagne, il existe un crédit prospection qui est bien plus robuste que le nôtre : si on le transposait de manière équivalente en France, il faudrait y consacrer 100 millions d'euros.

Par ailleurs, lors du débat sur la loi Macron, en 2015, avait été évoquée l'idée que les PME puissent avoir accès une deuxième fois au crédit d'impôt pour dépenses de prospection commerciale, à condition d'avoir un salarié chargé du développement à l'export. Nous avons de nouveau déposé des amendements en ce sens.

Nous dénonçons également le recul net du soutien productif aux entreprises. Ainsi, l'an dernier, dans la loi de finances pour 2018, vous avez renoncé au sur-amortissement que nous avions mis en place et qui a permis un vrai soutien à l'investissement des entreprises. Au lieu de cela, vous avez préféré libérer l'épargne en supprimant la quasi-totalité de l'ISF – une épargne qui, monsieur le ministre, ne s'est pas retrouvée dans l'économie productive.

Nous dénonçons votre manque d'initiative visant protéger les très petites entreprises. Nous le savons, l'une des difficultés des PME – ce n'est certes pas la seule – est l'accès au financement de leurs besoins en trésorerie. Cela a des conséquences sur leur rentabilité, et parfois même sur leur survie. Dans certains cas en effet, les commissions d'intervention représentent des sommes conséquentes. C'est dans cette optique que nous avons déposé un amendement visant à plafonner les commissions pour les TPE traversant des difficultés financières. En effet, nombre d'entre elles peuvent alors se retrouver prises dans un cercle vicieux.

Nous dénonçons aussi votre absence de volonté en matière de protection juridique des entreprises non cotées et de leurs actionnaires minoritaires, protection qui leur permettrait, dans le cas d'une prise de contrôle inamicale, de contrer le pillage de leur capital humain et de leur savoir-faire.

En la matière, monsieur le ministre, ce qui se passe en Allemagne est à mon sens également instructif. Pour la petite histoire, en 2004, les actionnaires minoritaires de Wella, PME créée en 1880 dans le secteur du shampoing, ont gagné face à son actionnaire ultra majoritaire, Procter & Gamble, alors que celui-ci souhaitait lui imposer une stratégie de réduction de taille.

Le droit allemand des sociétés non cotées régit les rapports entre les grandes sociétés et les sociétés petites et moyennes dont elles deviennent actionnaires, en tenant compte, notamment, de l'existence des groupes de sociétés de fait. Distinct du régime applicable au groupe contractuel de sociétés, le dispositif a pour principale vocation d'encadrer la situation de dépendance des PME et des ETI vis-à-vis de leur actionnaire majoritaire, c'est-à-dire la situation dans laquelle ce dernier exerce une influence ou prend d'une quelconque manière des mesures susceptibles d'être préjudiciables pour la société.

Extrêmement dissuasif, ce dispositif juridique a, outre-Rhin, prouvé son efficacité. On constate ainsi, en Allemagne, un nombre extrêmement faible de recours en responsabilité. Étant à l'abri des décisions préjudiciables de leur actionnaire majoritaire, les PME et ETI voient leur autonomie entrepreneuriale préservée. Elles ne craignent donc pas d'ouvrir leur capital. Nous avons traduit ce dispositif de protection dans un amendement et souhaitons, monsieur le ministre, que vous puissiez le soutenir.

Enfin, et il ne s'agit pas là d'une dénonciation mais d'une interrogation, nous nous interrogeons sur votre volonté réelle de faire de la transition énergétique un levier de relais de croissance économique.

En la matière, plusieurs pistes peuvent être évoquées, comme le fléchage de l'épargne vers la finance verte ou l'investissement public, que vous avez semble-t-il oubliés dans votre projet.

S'agissant du fléchage de l'épargne vers la finance verte, le groupe Socialistes et apparentés a déposé plusieurs amendements. L'un d'eux, je le dis très franchement, monsieur le ministre, est un copié-collé de celui qu'avait déposé à l'occasion de la loi Sapin 2 M. Castaner, qui est devenu depuis secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Nous espérons, monsieur le ministre que vous soutiendrez au moins cet amendement de votre collègue du Gouvernement !

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