Intervention de M'jid El Guerrab

Séance en hémicycle du mardi 25 septembre 2018 à 15h00
Croissance et transformation des entreprises — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaM'jid El Guerrab :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme le disait Winston Churchill, « on considère le chef d'entreprise comme un homme à abattre, ou une vache à traire. Peu voient en lui le cheval qui tire le char ». Il est heureux que l'exécutif s'attache à encourager résolument la création d'entreprises. Qui pourrait s'y opposer ? Ce dessein prend des formes diverses, qu'il s'agisse de la limitation des barrières à l'entrée ou de l'allégement des lourdeurs administratives. Trop de pesanteurs de ce type étouffent l'esprit d'entreprise et empêchent les nôtres de réussir aussi bien que chez nos concurrents.

En ce sens, je veux saluer les possibilités offertes par ce texte pour redresser rapidement les entreprises en difficulté. La vie entrepreneuriale, la « vie économique » pourrait-on dire, n'est jamais linéaire. Elle n'est pas faite que de succès, et l'on peut tirer des enseignements des revers de fortune. Il me semble juste de donner une autre chance à ceux à qui le sort n'a pas souri spontanément.

Je salue l'adoption à l'unanimité de l'amendement que j'ai soutenu en commission s'agissant de la remise d'un rapport gouvernemental sur l'entrepreneuriat féminin en France et de la possibilité de mettre en oeuvre, au niveau national, des actions pour accompagner les femmes créatrices d'entreprise. Je sais que Mme la présidente de la commission spéciale et M. le ministre y sont très sensibles.

L'entrepreneuriat féminin peine à progresser dans notre pays. Si la France est l'un des pays d'Europe qui comptent le plus de femmes qui travaillent, avec 48 % de la population active totale, celles-ci restent largement minoritaires dans la création d'entreprise, alors même que l'entrepreneuriat féminin est un puissant levier de croissance et de compétitivité.

Je me félicite aussi de l'initiative du rapporteur général, M. Roland Lescure, quant à la mise en place d'un dispositif d'évaluation et de suivi ad hoc. Il est sage qu'un comité d'évaluation soit établi et que le Parlement en soit partie prenante. Je crois également qu'il est absolument nécessaire d'améliorer et de diversifier les financements des petites et moyennes entreprises françaises, y compris celles implantées à l'étranger.

En effet, les Français sont partout dans le monde, et présents sur chaque continent. On estime entre 2 et 2,5 millions le nombre de nos compatriotes installés à l'étranger. Près de trois sur dix d'entre eux sont des créateurs d'entreprise, et ils sont de plus en plus nombreux à exporter l'excellence de notre savoir-faire. On compte entre 50 et 80 % de binationaux parmi les Français du monde. Ainsi sommes-nous bien loin des poncifs sur les évadés fiscaux ou sur les « néocolons ». La plupart d'entre eux aiment tout autant la France que leur pays d'accueil, où ils partagent très fréquemment une vie, une famille, un amour, des racines. Bien souvent aussi, ils y portent un projet d'activité économique.

Beaucoup de jeunes rencontrés à l'étranger vous disent que, pour réussir, ils ont dû partir. En effet, nos compatriotes réussissent de plus en plus à l'étranger, même si leur départ est souvent le fruit d'un échec dans notre pays. Nous voulons renverser la table, de façon que l'expatriation résulte d'un processus de réussite et que la France bénéficie de ses retombées positives. Voilà pourquoi, monsieur le ministre, plutôt que le « made in France », je propose le « made by France ».

Le made by France, c'est exporter l'excellence française à travers le monde, à travers nos jeunes, à travers notre diaspora. Le made by France, c'est changer de regard sur notre jeunesse et lui faire confiance, en lui disant : « Va conquérir le monde et, puisque tu m'aimes, tu reviendras ! » Le made by France, c'est aussi changer de paradigme. En effet, nos jeunes doivent devenir les soldats de cet esprit de conquête économique que vous appelez de vos voeux, monsieur le ministre. Appuyons-nous sur eux et, plutôt que de les considérer comme un problème, faisons-leur confiance.

Le made by France, c'est croire qu'un Français qui part à l'étranger est avant tout une chance pour notre pays. Partir, c'est grandir, et c'est nous faire grandir. Le made by France, c'est, après avoir dit Choose France ! dire à nos jeunes Conquer the world ! Le made by France, monsieur le ministre, ce serait très concrètement créer une banque des entrepreneurs français du monde. C'est un projet que je défends et auquel je crois profondément.

Les nombreux entrepreneurs français que j'ai rencontrés sur le terrain, lors de mes déplacements en circonscription, soulignent à chaque fois les difficultés qu'ils rencontrent pour obtenir des financements. Combien de projets non aboutis ! La somme de garanties exigées est telle qu'en pratique, il leur est quasiment impossible d'obtenir une aide pour se développer et conquérir de nouveaux marchés. Voilà pourquoi j'ai déposé plusieurs amendements visant à permettre à la Caisse des dépôts ou à Bpifrance de financer, par le biais d'une expérimentation et grâce à un prêt, des entrepreneurs français situés à l'étranger, même quand leur entreprise n'est pas de droit français.

J'espère, monsieur le ministre, que vous me rejoindrez sur ce point : les Français qui vivent à travers le monde sont une force et une richesse que nous n'exploitons pas assez. Transformons l'amour que nous leur témoignons dans les tribunes et les réunions dans les ambassades en acte d'amour concret, tangible. Faisons-leur confiance et donnons-leur les moyens de réussir.

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