Intervention de André Chassaigne

Séance en hémicycle du jeudi 27 septembre 2018 à 21h30
Croissance et transformation des entreprises — Article 13

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

Soyons clairs : j'arrive à l'instant, et je prends à la volée ce débat sur les chambres de commerce et d'industrie. Vous nous présentez un bel habillage de cet article avec, comme l'a dit mon collègue Dominique Potier, une intervention argumentée – comme d'ailleurs celle du rapporteur. Mais on sait bien que derrière tout cela, il s'agit de répondre à l'exigence, fixée comme telle, de réduction des dépenses publiques. La réalité, elle est là : le fond du débat sur l'évolution des chambres de commerce et d'industrie, c'est qu'il s'agit d'avoir moins de participation de l'État et de trouver d'autres moyens pour les faire vivre. N'occultons pas ce qui constitue le socle des modifications qui nous sont soumises aujourd'hui.

Je voudrais tout de même rappeler, pour expliquer ma réaction un peu vive aux propos du rapporteur tout à l'heure, ce que représentent les chambres de commerce et d'industrie, notamment dans nos territoires ruraux ou même dans de petits bassins industriels. À propos de ces derniers, je pourrais citer, en Auvergne, Montluçon que je connais bien, ou Thiers, dont je suis le député, qui avait une chambre de commerce et d'industrie qui représentait un levier de développement économique à travers ses liens avec la société civile et les élus. Quand j'étais jeune député, combien de fois avons-nous eu des réunions avec les CCI et les chefs d'entreprise pour aborder les questions du développement local, l'accueil des entreprises, ce qui était possible en termes de zones d'activité ! Elles avaient un rôle de proximité déterminant. Or aujourd'hui, même si ce n'est pas vous qui en portez la responsabilité, monsieur le ministre, il faut bien constater que ces chambres de commerce et d'industrie sont devenues des coquilles vides et ne remplissent plus cette fonction qui était non seulement indispensable pour un territoire, mais aussi et surtout pour les petites et moyennes entreprises. On avait là non pas un guichet, mais un outil d'accompagnement des entreprises pour leur installation, pour la formation de leurs personnels, pour leur expansion. C'était quelque chose d'extrêmement important, d'autant plus que cette disparition des chambres de commerce et d'industrie n'est pas un phénomène isolé : dans les années 2000, on a assisté à la disparition d'autres outils dont bénéficiaient les petites et moyennes entreprises. Je pense par exemple aux agences locales de la Banque de France, qui les conseillaient si nécessaire aux niveaux comptable et économique : elles ont été fermées, vidées, elles n'existent plus. Je pense aussi aux comités d'expansion économique dans les départements, ceux-ci ayant alors une compétence économique, comités qui ont contribué au travail colossal accompli en termes de développement économique : ils ont disparu. Un outil supplémentaire, une nouvelle proximité apparue grâce aux diverses lois de décentralisation, qui cette fois était départementale, a disparu puisque ces missions ont été prises en charge au niveau des régions, L'ancien président du conseil général du Cantal, M. Descoeur ici présent, le sait bien.

L'étape suivante a été le regroupement autour de grandes régions, par exemple Auvergne-Rhône-Alpes, où désormais le coeur de l'action économique ne va plus être Clermont-Ferrand, mais Lyon. C'est donc un éloignement supplémentaire. Certes, cela ne va peut-être pas gêner beaucoup les grandes entreprises comme Michelin à Clermont-Ferrand ou le semencier Limagrain, mais les PME, elles, perdent ainsi petit à petit, décennie après décennie, des accompagnateurs déterminants pour leur activité. Les chambres de commerce et d'industrie de ces territoires vont disparaître. Déjà, la plupart des structures de la CCI de Thiers ont disparu : les locaux ont été vendus à la communauté de communes, il doit rester quelques techniciens alors qu'il y avait avant des équipes complètes. À Ambert, situé également dans ma circonscription, c'est pratiquement rayé de la carte – il doit rester deux personnes dans la chambre de commerce de proximité.

La réalité, c'est que vous soignez le mal par le mal. Aujourd'hui, les chambres de commerce et d'industrie qui s'en sortent, vous l'avez dit vous-même, sont celles qui ont des recettes propres. Je présume que les chambres de commerce et d'industrie de Lyon ou de Marseille ont des recettes qui doivent représenter 80 % de leurs ressources budgétaires, alors que les petites chambres de commerce et d'industrie, situées notamment dans les zones rurales, percevaient 80 % de dotations et 20 % seulement de recettes extérieures étant donné le tissu économique et le type d'usagers – des petites entreprises. Comment voulez-vous les maintenir avec leurs seules recettes propres ? Ce qui était un service public à destination du milieu économique va se transformer désormais en prestations payantes.

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