Intervention de Charles de Courson

Séance en hémicycle du mardi 2 octobre 2018 à 21h30
Croissance et transformation des entreprises — Article 30

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCharles de Courson :

D'où vient la loi de 1816 ? Il faut le dire et le répéter : Napoléon a pillé les caisses publiques pour financer ses aventures guerrières, qui ont fini par une catastrophe historique. C'est pour cela qu'en 1816, il a été décidé que le Parlement ferait écran et protégerait l'épargne des Français. Cela est toujours vrai, mes chers collègues, car tout gouvernement est tenté, un jour ou l'autre, étant toujours en difficulté, de piller l'épargne des Français pour combler les trous de ses budgets ! Il n'y a rien là de nouveau sous le soleil !

La grande erreur du Gouvernement – je crois qu'il l'a reconnu, d'après les discussions que nous avons eues avec M. le ministre – , c'est d'avoir cédé à la direction du Trésor en faisant passer le nombre de ses représentants de un à cinq. Outre le directeur du Trésor, qui sera toujours là, le texte gouvernemental prévoit quatre experts nommés par le ministre de l'économie.

Qui va vendre au ministre d'excellents candidats ? La direction du Trésor, bien sûr ! Il y aura donc cinq représentants de la direction du Trésor sur quinze membres de la commission.

Si, qui de surcroît, deux des trois représentants de l'Assemblée nationale et un des deux du Sénat appartiennent à la majorité – en général, on se partage cela d'une façon équitable – , avec les membres nommés par le Président de l'Assemblée et celui du Sénat, il y a un vrai risque que l'exécutif domine totalement la commission, pour peu les parlementaires de la majorité ne lui résistent pas. On voit bien que la composition qu'on nous propose est totalement inadaptée. Notre groupe a donc déposé un amendement, et il y a aussi l'amendement du « trio », soit nos trois représentants à la commission de surveillance, qui revient sur ce sujet et auquel je me rallierai avec plaisir.

Il y a un deuxième débat : celui des compétences. Au fond, à part sa mission de surveillance, la commission a très peu de compétences. C'est donc à raison que le texte gouvernemental renforce ces compétences, mais je suis de ceux qui pensent que cette commission de surveillance devrait se transformer en un vrai conseil d'administration, doté des pouvoirs d'un conseil d'administration.

Reste la nomination du directeur général, poste actuellement à la discrétion du Gouvernement. On ne touche pas à ce statut, tout le monde rêvant d'être directeur général de la Caisse des dépôts ! Sur ce point, vous êtes un peu conservateur, monsieur le ministre, si vous avez progressé sur les deux autres. Il serait logique que la commission de surveillance devenue un vrai conseil d'administration puisse proposer et choisir un candidat. Ce serait la solution la plus logique pour protéger l'épargne des Français. Nous vous proposerons donc un certain nombre d'amendements visant à renforcer les pouvoirs du conseil de surveillance.

Un dernier point me paraît d'une importance considérable : le rapprochement entre la Caisse des dépôts et le groupe La Poste. Cela fait des années que les présidents successifs du groupe La Poste rêvent d'intégrer la CNP dans leur groupe. Ce n'est pas une si mauvaise idée : tous les groupes bancaires se sont diversifiés dans la bancassurance et les groupes d'assurance dans l'assurance bancaire. Cela serait conforme à une certaine logique commerciale du point de vue de la distribution des produits de la CNP – notre collègue Savatier et nos autres représentants à la commission de surveillance reviendront sur ce point.

Le problème, c'est que l'État n'a pas le sou. La logique eût été qu'il dote le groupe La Poste de quelques milliards pour lui permettre de racheter sa part de la Caisse des dépôts. Or, ce qui est proposé, c'est de passer par des échanges de titres pour que l'État n'ait rien à sortir de sa poche. Mais, de ce fait, le groupe La Poste va devenir la filiale de la Caisse des dépôts. Je trouve que l'on n'a pas assez réfléchi, en adoptant en commission l'amendement gouvernemental qui a introduit cette modification : n'est-on pas en train de changer la nature de la Caisse des dépôts, de la transformer en une holding d'État à la tête d'un conglomérat ? Il faudrait avoir une vraie réflexion sur les conséquences à long terme de cette affaire. Mais j'anticipe sur les articles suivants.

S'agissant de l'article 30, nous nous rallierons à la position des trois sages que nous avons désignés pour nous représenter à la commission de surveillance.

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