Intervention de Béatrice Descamps

Séance en hémicycle du jeudi 11 octobre 2018 à 9h30
Inclusion des élèves en situation de handicap — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBéatrice Descamps :

Monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, je renouvelle mes remerciements à notre collègue Aurélien Pradié pour le travail qu'il a accompli. C'est grâce à lui que nous sommes réunis pour discuter d'un sujet très important : l'inclusion scolaire, et plus précisément l'accompagnement humain des élèves en situation de handicap.

Nous savons, monsieur le ministre, que Mme Cluzel et vous-même avez la ferme volonté d'avancer sur ce sujet. Le récent décret du 27 juillet 2018 est une preuve d'engagement : il représente une étape supplémentaire dans l'accompagnement des élèves en situation de handicap. Je vous en remercie.

341 000 élèves sont en situation de handicap. Certains sont dans des établissements spécialisés, parce que cet accueil est plus approprié pour eux. Beaucoup d'autres vont à l'école et aujourd'hui, 175 000 d'entre eux peuvent bénéficier d'un accompagnant. Nous sommes donc tous concernés, tant du côté du Gouvernement que de notre côté, parlementaires que nous sommes. Nous avons la responsabilité de débattre de ce sujet, comme nous aurons à débattre ultérieurement – je l'espère – des établissements spécialisés, qui ne sont pas suffisants ou pas adaptés.

L'accompagnement des élèves est déjà une réalité depuis plusieurs années, mais nous savons tous que beaucoup reste à faire, qu'il s'agisse des enfants, des familles ou des accompagnants. Depuis 2005, cet accompagnement permet à de nombreux jeunes en situation de handicap de trouver leur place à l'école, de grandir, d'évoluer, de s'instruire, de se construire, d'avoir une vie sociale, de partager. Ce partage permet à tous de s'enrichir mutuellement et de préparer une véritable société inclusive pour demain – car il est aussi question des valeurs citoyennes que nous voulons transmettre à nos enfants par le biais de l'école.

Comment pourrait-on parler d'inclusion dans la société, d'inclusion professionnelle, si tout n'est pas fait pour l'inclusion scolaire ? Nous savons tous que l'école est un moment crucial pour chacun d'entre nous : c'est à l'école que nous apprenons à vivre ensemble. Or il n'y a pas d'inclusion sociale sans citoyenneté. Dans notre République, l'émancipation, l'accomplissement de soi passe par l'école. Nous voici donc face à une véritable question de société : in fine, quelle République voulons-nous ? À quelles valeurs répondent notre réflexion et nos décisions ? Agir pour une meilleure inclusion des élèves en situation de handicap, c'est aussi oeuvrer pour l'égalité des chances.

C'est aujourd'hui à nous qu'il incombe, Gouvernement et Assemblée nationale, au-delà de nos couleurs politiques, d'améliorer l'accompagnement de ces élèves. C'est une tâche noble, mais ô combien lourde de responsabilités.

Se pose en outre la question du recrutement et de la formation des accompagnants. Je préfère, à ce propos, le terme « accompagnant » au terme « aidant », car il s'agit, à l'école, d'accompagner ces élèves, en les aidant, certes, mais aussi en les soutenant et en valorisant ce qu'ils peuvent faire seuls.

Durant de nombreuses années, la plupart des accompagnants étaient recrutés parmi les personnes pouvant bénéficier d'un contrat aidé et se formaient sur le terrain. C'est encore souvent le cas aujourd'hui, mais à un moindre degré : le statut unique est en marche et le décret de 2018 a consolidé la formation d'adaptation à l'emploi. Toutefois, nous croyons à la nécessité d'une formation plus longue, avec deux niveaux de qualification, ainsi qu'il résulte de l'un de mes amendements qu'a retenu M. le rapporteur.

D'autres questions importantes subsistent, comme celle de leur temps de travail et surtout celle de leur salaire. Savez-vous, monsieur le ministre, qu'à l'heure actuelle, un accompagnant ayant douze années d'ancienneté, titulaire depuis six ans de l'éducation nationale, ayant signé un contrat de vingt-sept heures – mais travaillant en réalité trente heures quarante-cinq par semaine pour compenser les vacances scolaires – , ayant acquis une expérience à l'école maternelle, à l'école primaire, au collège, au lycée et même en BTS, ne gagne que 815 euros nets ! Beaucoup d'accompagnants, au reste, n'ont que des contrats de vingt-quatre heures : vous imaginez le montant de leur salaire…

Ce projet de loi a également l'intérêt d'aborder d'autres points sur lesquels il serait intéressant de revenir et de poursuivre nos débats : le rôle des maisons départementales des personnes handicapées, les difficultés qu'elles rencontrent – ainsi que les conseils départementaux : les deux questions sont liées – , le début des prises en charge, les délais.

En tant qu'ancienne directrice d'école, j'ai été confrontée maintes fois au sujet du handicap sous toutes ses formes. Il est donc important d'avoir à l'esprit, je l'ai dit en commission, que certains handicaps, troubles dits « dys » – d'après leur préfixe – , autisme, et d'autres encore, sont bien souvent décelés à l'école sans être pour autant visibles dès le premier jour de la scolarisation. L'article 4 de la proposition de loi semble pourtant, malheureusement, s'adresser exclusivement à des handicaps moteurs. La distinction entre les divers handicaps permettrait pourtant un accompagnement au plus près de l'enfant, et surtout plus adapté.

Le parcours éducatif, auquel je retirerais l'adjectif « spécialisé », est extrêmement intéressant et important, il faut absolument que l'on s'y attelle rapidement, car le chemin sera long, ne nous le cachons pas. À la suite d'un partage d'expérience à Stockholm sur ce sujet, j'ai été admirative de voir la capacité, dans ce pays, à réunir tous les membres des équipes en contact avec les enfants, qu'il s'agisse des accompagnants, des médecins, des parents, des orthophonistes, des éducateurs et des collectivités territoriales, ainsi que les enseignants, qu'il faudra d'ailleurs écouter et placer au centre de nos débats, afin de prendre en compte globalement les besoins de ces enfants et leur capacité d'autonomie.

Le groupe UDI, Agir et indépendants souhaite donc l'examen de cette proposition de loi. Il faut en effet placer au centre de nos débats l'intérêt de l'élève, afin d'améliorer au mieux l'environnement dans lequel il évolue avec son handicap tout en valorisant ce qu'il sait faire et peut réaliser seul. Nous partageons, monsieur le rapporteur, vos convictions sur la nécessité d'agir pour une meilleure inclusion des élèves en situation de handicap, conviction que je sais être partagée également par M. le ministre.

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